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Entretenir un orgue

L’actualité[1] du diocèse nous amène à aborder la question de l’entretien des orgues.

En effet, l’été dernier fut une période difficile pour les orgues et les organistes ! Tous les instruments ont beaucoup souffert de la sécheresse et certains ne s’en sont pas remis. Pour comprendre ce phénomène, il faut savoir ce qu’est un orgue, apprendre la vigilance nécessaire pour les préserver, veiller au bon entretien qui ne se résume pas au simple accord de certains tuyaux.

Les différentes parties de l’orgue

Qu’est-ce qu’un orgue ?

On dit souvent que c’est une grande flûte de Pan. Sauf que l’organiste ne peut pas souffler dans tous les tuyaux ! Alors il faut une soufflerie.

Et puis comme il y a beaucoup de tuyaux, il faut amener l’air sous chacun, mais en sélectionnant ceux qu’on souhaite faire sonner, c’est le sommier.

Et pour manœuvrer tout cela, il y a une mécanique précise, transmission entre les doigts de l’organiste et l’arrivée d’air au pied de chaque tuyau.

Enfin, pour compliquer les choses, il y a beaucoup de tuyaux différents, graves, aigus, grands ou petits, étroits ou larges, puissants ou doux, en bois ou en métal. Chacun ayant son rôle.

Et comme si cela ne suffisait pas, il y a le plus souvent dans un orgue… plusieurs orgues ! Avec pour chacun, sa mécanique, ses sommiers, ses tuyaux… Chaque orgue possède son clavier. La console d’un orgue est constituée d’autant de claviers qu’il y a d’orgues dans son buffet[2].

La soufflerie

Il faut de l’air sous pression pour sortir un son d’une flûte. Et comme dans un orgue, il y a plusieurs centaines de tuyaux, parfois même plusieurs milliers, il faut beaucoup d’air ! Pour cela on utilise des soufflets. Un premier amène du vent dans un second qui régule la pression.

Les premiers étaient actionnés par des « souffleurs », parfois payés en litre de vin. On les appelait les « pompes à vin ». Aujourd’hui, un ventilateur remplace les souffleurs et permet à l’organiste d’être autonome.

Les seconds réservoirs sont chargés de plaque de plomb ou de matériaux lourds (comme de la pierre) pour mettre la pression. Celle-ci n’est pas aléatoire mais bien calculée afin que tous les tuyaux aient la même.

Le vent est ensuite amené dans le sommier via des « porte-vents », sorte de tuyaux en bois dont le parcours doit être le plus direct possible pour que le vent ne subisse pas de variation et n’engendre pas de secousses (de tremblement dans le son, ou pire de « houppements » par manque d’air).

Porte-vent et soufflet

Le ou les sommier(s)

Le vent, bien dynamique par la pression obtenue dans les soufflets, arrive par dans une boîte appelée laye. Au-dessus de la laye, il y a des couloirs (appelés gravures) sur lesquels sont posés les tuyaux. Chaque gravure correspond à une touche du clavier.

Pour faire rentrer le vent dans le couloir, une petite soupape est accrochée à la touche. Quand on appuie sur la touche, la soupape s’ouvre et le vent s’engouffre dans la gravure.

Tous les tuyaux posés sur la même gravure correspondant à la touche sont alors alimentés.

Seulement voilà, l’organiste ne souhaite pas faire sonner l’orgue avec tous les tuyaux en même temps. Les auditeurs non plus ! Alors, entre la gravure et les pieds des tuyaux, il y a une réglette percée et coulissante qu’on appelle un registre. Lorsque les trous du registre correspondent aux pieds des tuyaux, le vent passe. Lorsqu’on décale la réglette, les tuyaux n’ont pas de vent.

 

La mécanique

La mécanique (ou transmission) de l’orgue, c’est ce qui, à partir de la touche du clavier, ouvre ou ferme la soupape dans le sommier.

Il existe plusieurs systèmes. Le plus fiable est strictement mécanique à l’aide de très fines tiges de bois qu’on appelle des vergettes. Elles sont accrochées aux touches et aux soupapes qu’elles ouvrent lorsqu’on abaisse les touches.

Les orgues grandissant fortement au XIXe siècle, les mécaniques directes étaient devenues trop lourdes sous les doigts. Alors, on a installé des machines-relais qui, actionnées par la touche, tirent les soupapes, ou encore, un système pneumatique-tubulaire, ou une électrification (de la touche à la soupape), et aujourd’hui des systèmes électroniques.

Mais rien ne vaut la mécanique directe qui permet à l’organiste de sentir du bout des doigts l’ouverture de la soupape pour donner plus ou moins d’attaque à chaque tuyau, à chaque note comme le fait un flûtiste.

Les tuyaux

Pour une même note, on modifie le timbre de chaque tuyau par son principe (à bouche ou à anche), sa forme, son matériau, son diapason (son diamètre) et toute sorte de réglages de précision déterminant sa puissance, son attaque…

C’est pour cela que sur un orgue, il y a plusieurs jeux (registres).

On trouve des tuyaux en métal (alliage de plomb et d’étain ou plus rarement en cuivre (et même en zinc) ou en bois.

Pour chaque registre (jeu), il y a un tuyau par touche du clavier, du grave à l’aigu sauf exceptions, et elles sont nombreuses. On trouve des registres à 2, 3, 4, 5, voire plusieurs tuyaux par note. Ces jeux s’appellent des mixtures. Ils produisent un effet sonore particulier, typique de l’orgue.

On voit là que toutes les parties d’un orgue sont essentiellement constituées de bois et de métal.

La particularité de ces matériaux est qu’ils sont très sensibles aux changements de température et d’hygrométrie.

De par leur emplacement dans les églises, souvent en tribune, ils subissent de graves dégâts par les variations brusques de ces paramètres. Le chauffage d’hiver amenant la température en tribune de 7° à 30° en quelques heures fait « travailler » les bois et dilater les tuyaux. Ou bien, ouvrir grandes les portes en été pour faire rentrer la chaleur dans une église fraîche, ou bien placer des bougeoirs en nombre sous la tribune au risque d’encrasser l’orgue par la suie[3]

Toutes les parties de l’orgue sont touchées violemment. C’est une catastrophe rapidement fatale si l’on n’y prend garde.

L’entretien courant[4]

Prendre garde aux dégâts irrémédiables, c’est le rôle de l’entretien courant. Il se fait en permanence grâce à l’organiste titulaire (ou délégué) en notant tous les petits dysfonctionnements, sur le plan mécanique ou sonore. Il transmet ses remarques au facteur d’orgue chargé de l’entretien.

Il est en effet nécessaire de mettre en place un contrat d’entretien avec un facteur d’orgues compétent. Ce contrat se résume trop souvent à l’accord des jeux d’anches deux fois par an. Mais cela ne suffit pas… Le contrat doit préciser que l’entretien concerne autant les questions mécaniques que l’accord en général (pas seulement les tuyaux d’anches), l’observation des éventuelles dégradations de l’instrument (dessèchement des peaux, dégâts des xylophages, des rongeurs, chauve-souris, lèpre de l’étain …), la réparation des petits problèmes ne nécessitant pas de travail en atelier, et l’établissement de devis pour les réparations plus lourdes.

Un orgue, c’est un peu comme un château de cartes. Un problème en engendre toujours un autre, jusqu’au moment où le coût des réparations devient exorbitant pour le propriétaire et l’instrument s’effondre.

Le relevage

C’est une opération de maintenance à faire tous les 10 à 25 ans en fonction de l’instrument.

Il s’agit là de nettoyer, remettre en état de fonctionnement tout ce qui est usé ou déformé, et assurer le bon fonctionnement de l’instrument tel qu’il a été conçu.

La restauration

La restauration intervient en général tous les 40 à 50 ans. Le facteur d’orgue démonte entièrement l’instrument et refait à neuf l’instrument avec les matières anciennes. Il peut aussi résoudre des problèmes de structure, modifier l’agencement de l’instrument pour en améliorer l’efficacité. Mais ce chantier doit être mené avec la plus grande vigilance et compétence, en concertation avec des experts indépendants pour garantir l’intégrité historique, esthétique et artistique de l’orgue.

Nous reviendrons sur tous ces sujets en partant d’exemples locaux. Cela nous permettra d’aller à la rencontre des organistes et à la découverte des magnifiques instruments du diocèse.

Didier Adeux,
organiste à Gaillac et Lavaur

[1] La restauration de l’orgue de Saint-Salvy à Albi, le démontage et la restauration de l’orgue de l’abbatiale Saint-Michel à Gaillac, entre autres.

[2] Le buffet est le meuble dans lequel sont disposés tous les éléments de l’orgue.

[3] Situation que connaissent certains instruments dans les lieux de culte très fréquentés

[4] Voir le site internet d’Orgues en France : https://www.orgue-en-france.org/linstrument/fiches-techniques/lentretien-dun-orgue/

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