Homélie de l’ordination presbytérale de l’Abbé Jean-Baptiste Crépin

Frères et sœurs,
Cher Jean-Baptiste,

La célébration d’une ordination presbytérale nous place devant le mystère du choix de Dieu et de la réponse d’un homme appelé à proclamer la Bonne Nouvelle et à poser des signes qui sont l’expression de sa réalisation en faveur de ceux qu’il accueille. Déjà la fin du livre d’Isaïe dessinait l’esquisse d’un mystérieux personnage envoyé par le Seigneur pour annoncer la Bonne Nouvelle aux humbles. La tradition chrétienne a perçu qu’il s’agissait du Messie, d’autant plus aisément que Jésus, en lisant ce passage du livre d’Isaïe dans la synagogue de Nazareth, a affirmé : « Aujourd’hui s’accomplit le passage de l’Écriture que vous venez d’entendre ». Sur Jésus repose l’Esprit Saint, comme cela a été manifesté lors de son baptême par Jean le Baptiste. Nous croyons, comme saint Paul l’écrivait aux Corinthiens, : « Que tout cela vient de Dieu. Il nous a réconciliés avec lui par le Christ et nous a donné le ministère de la réconciliation » (2 Co 5, 18). À la suite du Christ, unique grand prêtre parfait, souverain et éternel, le Seigneur choisit par la médiation de l’Église des hommes chargés de poursuivre sa fonction sacerdotale.

Dans quelques instants, Jean-Baptiste, par l’imposition de mes mains sur votre tête et par la prière consécratoire spécifique qui demande à Dieu l’effusion de l’Esprit Saint et de ses dons, vous deviendrez prêtre à l’image du Christ, prêtre suprême et éternel. Vous serez consacré pour prêcher l’Évangile, pour être pasteur des fidèles et pour célébrer le culte divin en vrai prêtre du Nouveau Testament. L’Évangile qui vient d’être proclamé nous a conduits sur l’un des principaux sommets du Nouveau Testament. À ce moment précis, où le Seigneur va entrer dans sa Passion bienheureuse, il confie à ses disciples la quintessence de son enseignement : « Demeurez dans mon amour, comme moi j’ai gardé les commandements de mon Père et je demeure dans son amour ». Puis : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ». Configuré au Christ par votre ordination, non seulement le programme de votre vie à venir est maintenant clairement tracé, mais vous aurez à communiquer à tous la Parole de Dieu par votre enseignement et votre exemple. En « poursuivant sur terre l’œuvre de la Rédemption » selon la belle expression du saint Curé d’Ars, vous agirez comme le Christ pour la croissance du peuple de Dieu et la réconciliation de l’humanité entière avec son Créateur et son Sauveur dans la mouvance de l’Esprit Saint.

Aux disciples sans doute surpris par les propos si solennels et profonds de Jésus à l’issue de la Cène pascale, la joie est annoncée : « Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite » (Jn 15, 11). En effet, existe-t-il au monde une joie plus grande que celle de provoquer Dieu dans le cœur des autres ? La joie et le tourment du prêtre consistent à permettre que la vie nouvelle, celle de Dieu, puisse éclore dans le cœur d’un frère humain. Tout faire pour préparer la venue de l’Esprit Saint dans les âmes et accompagner la croissance des fidèles dans la fidélité. Voilà ce qui rende le prêtre heureux. Aujourd’hui l’Église a besoin de prêtres heureux. Le secret du bonheur aux jours de lutte – car il y en aura – contre ce qui est contraire au véritable amour en soi et autour de soi, comme aux jours paisibles, réside dans une donation sans cesse renouvelée, à la manière du Christ donnant sa vie pour la vie du monde.

Que la Mère de Dieu, Jean-Baptiste, vous garde fidèle à vos engagements et vous obtienne d’être un serviteur joyeux de tout frère en humanité, à commencer par les plus éprouvés et les plus petits.

Amen

† Jean Legrez, o.p.
Archevêque d’Albi