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Toussaint au Brésil, par Dom Geraldo. À relire aujourd’hui…

Lettre d’Amazonie dans son n° du 3ème trimestre 2020, publie une méditation sur Toussaint qu’avait rédigée Mgr Gérard Verdier

À relire aujourd’hui !

 

Toussaint : vers la splendeur éblouissante !

Toussaint au Brésil : aucun mouvement de foule vers les cimetières et rien dans la liturgie sur la fête de Tous les Saints puisque, lorsque le 1er novembre est un jour de semaine, cette solennité est toujours reportée au dimanche suivant…

Par contre, le 2 novembre, c’est vraiment le Jour des Défunts (O Dia de Finados).
Très tôt, des multitudes emplissent les cimetières, nettoient les tombes envahies par les herbes, plantent en terre ou posent sur une dalle, leurs bougies allumées, puis se recueillent et conversent un moment avec parents et connaissances…

 

 

La rue adjacente est entièrement occupée par des dizaines de camelots, vendant, à la criée, paquets de petites chandelles, couronnes en papier multicolore, sandwiches, gâteaux, eau minérale …
A la nuit tombée, le désordre de ces tombes délabrées s’estompe et le Campo Santo devient un immense champ de lumière.

En sortant du cimetière, je remarque des cierges qui brûlent en bordure du fleuve.
Un jeune homme est là, accroupi, les yeux perdus en direction des rapides… Au bout d’un moment, il me regarde, me reconnaît et dit :
« – C’est pour ma fiancée…
– Que lui est-il arrivé ?
– Elle s’est noyée à la plage do Acἀcio. Un tourbillon l’a emportée … ».
Il baisse la tête et pleure doucement…
« – José Carlos, tu crois qu’elle est avec Dieu maintenant ? C’était une fille bien ; elle est dans la Lumière ! ».

Oui, Dieu est Lumière… Si nous marchons dans la lumière, nous sommes en communion les uns avec les autres (Jean 1,5).

 

La mort reste si proche ici ! On ne la cache pas. Le rituel est familial, rapide, car un corps ne peut être gardé plus de 24h. La nuit, c’est le vélorio (la vigile).

On évoque le disparu, on s’entretient de choses et d’autres, mais surtout on est présent à la famille en deuil.

Le matin, un prêtre ou un ministre laïc vient prier et donner une bénédiction, avant que le corps ne soit conduit à sa dernière demeure. Le septième jour, on célèbre une messe où se retrouvent parents et amis venus de loin…

 

 

Après le Jour des Défunts, très attendu, vient la Toussaint qui n’est pas une fête populaire, tout comme la Veillée Pascale, si peu fréquentée, en comparaison de l’affluence du Vendredi Saint !
Est-ce la conséquence d’un contexte social de souffrance et de mort qui pèse encore trop sur le peuple ou est-ce en partie le fruit d’une évangélisation trop moraliste et sentimentale, pas assez biblique et mystique ?

Heureux les pauvres en esprit, car le Royaume des cieux est à eux ! (Matthieu 5,3)

L’idéal de bonheur proposé par Jésus dans les Béatitudes est un vrai défi même pour les déshérités, en principe, les mieux placés pour rentrer dans le Royaume. Ce Royaume, les pauvres de tout y croient dur comme fer… mais pour demain !

Car, dans l’immédiat, c’est le chômage, la faim, l’insécurité absolue… Mais ils ont la certitude qu’ils seront, un jour futur, rassasiés, consolés, comblés de miséricorde (Matthieu 5, 4-6-7)

Heureux les doux, ils auront la terre en héritage (Matthieu 5, 5)

Incompréhensible, pour la plupart, entourés de grands propriétaires terriens qui usent des armes économiques, politiques et, bien sûr, de toutes sortes de violences pour chasser les petits paysans de leurs terres et augmenter leur immense patrimoine…

 

Quartier populaire de Guajarà

 

Heureux les pacifiques (Matthieu 5, 9)

Partout la violence règne, en zone rurale et dans les grandes villes.

Heureux les persécutés pour la justice, car le royaume des cieux est à eux (Matthieu 5, 10)

Cette béatitude est la mieux comprise : oui, ils sont entrés dans le Royaume des Cieux, Chico Mendes, persécuté et assassiné pour défendre les seringueIros et leur forêt d’Amazonie ; ainsi que la Sœur Dorothy, exécutée pour la défense des Sans Terre.

 

Dom Benedito (qui a succédé à Dom Geraldo) dans un village indien

Malgré notre difficulté à les vivre entièrement, les Béatitudes sont la route du vrai bonheur, le chemin de la joie en plénitude. Elles sont la voie royale de la sainteté, qui fait de nous le sel de la terre et la lumière du monde (Matthieu 5, 13), car notre amour doit être agissant, rayonnant, dans la construction d’un monde plus juste et plus fraternel.

Elles nous ouvrent enfin un horizon illimité : puisque, quand Jésus se manifestera, nous serons semblables à Lui, parce que nous le verrons tel qu’il est (Jean 3, 2). Et dans ce face à face, nous contemplerons la splendeur du Seigneur éblouissante comme la lumière (Habaquq 3, 4).

 

Envers de la croix épiscopale de Mgr Verdier