Homélie de l’appel décisif

Homélie de Mgr Jean-Louis Balsa
Appel des catéchumènes tarnais

Chers amis,

Je vais m’adresser d’abord essentiellement aux catéchumènes, mais à travers les catéchumènes c’est à vous, à nous tous, que je m’adresse.

Hier, j’ai pu rencontrer quelques-uns et quelques-unes d’entre vous. Il y avait aussi des jeunes qui allaient être baptisés et j’ai été frappé par le fait que vous vivez quelque chose d’extrêmement intense et une rencontre réelle avec Dieu.

Si on pouvait encore douter de l’existence de Dieu, il suffit de vous regarder et de voir ce que le Saint-Esprit est en train de faire dans la vie de chacun et de chacune d’entre vous.

C’est un vrai miracle! Et si on cherche des miracles, ce n’est pas la peine d’aller chercher de midi à 14h00, car c’est vraiment une incarnation de l’amour de Dieu qui vous a repéré, qui est venu vous chercher dans des vies extrêmement différentes, complexes, parfois bizarres.

Pourtant l’Esprit Saint est venu vous chercher et il est venu vous chercher au bon moment.

Peut-être est-ce une bonne chose que vous n’ayez pas été baptisés bébé. C’est très bien de baptiser les bébés parce que les parents y croient et parce qu’ils leur transmettent le meilleur. Mais vous, Dieu a préféré attendre et c’est maintenant votre moment.

Dans 40 jours, ce sera le grand moment de votre baptême, de votre plongée dans la mort du Christ pour pouvoir ressusciter avec Lui. Sortir de cette vie qui est une vie pas vraiment humaine, mais une vraie vie avec Dieu.

Alors je voudrais qu’on se réjouisse.

Juste avant la rencontre que nous avons eu hier, il y avait un jeune qui lui aussi allait être baptisé; je lui ai demandé: “Mais pourquoi veux-tu  être baptisé ?” Du haut de ses 14 ans, il répondu : « Parce que j’ai envie de changer de vie. Je veux changer de vie ». Là aussi c’est étonnant et c’est miraculeux qu’un jeune comme celui-là (et d’autres) puisse dire “J’ai envie de changer de vie”.

Et c’est bien à cela que le Seigneur vous appelle. Oui il vous appelle à constamment changer de vie. 

Maintenant je m’adresse aux « vieux chrétiens » qui sont dans cette église.

Pour nous aussi le baptême n’est pas derrière nous. Quelles que soient les années ou la couleur des cheveux que nous avons, le baptême sera toujours devant nous. C’est un appel, un appel à la conversion et, nous l’avons entendu aujourd’hui, un appel à une vraie conversion. 

Mais à une conversion à quoi ?
Une conversion d ‘abord pour se mettre à professer la foi en Jésus Christ.

Mais pourquoi professer notre foi en Jésus Christ ? Quel est l’intérêt ?
L’intérêt, c’est justement de passer de la mort à la vie.

Je crois qu’on a tous fait l’expérience dans notre vie d’essayer d’améliorer les choses et pas de les aggraver, (à moins d’avoir l’esprit tordu, ce qui arrive, mais globalement nous essayons de les améliorer). Toutefois parfois, malgré nous, nous les aggravons.
Finalement au bout du compte, on atteint toujours une sorte de plafond. À un moment donné on n’y arrive pas entièrement. D’ailleurs la preuve est faite quand on regarde le monde tel qu’il est : regardez ce qui se passe actuellement partout. On voit des milliers d’êtres humains s’entretuer et des millions mourir partout, soit par des guerres, soit par la famine. Moi qui viens de la Méditerranée, elle s’est transformée en cimetière pour des gens qui y sont morts noyés.

Partout il y a de la mort, peut-être y a-t-il aussi de la “mort” qui règne dans nos familles, dans nos entourages, ou en nous-mêmes. Celle qui nous détruit avant qu’on soit mort. Parce qu’il y a 1000 manières de mourir et la mort finale, au bout du compte, n’est qu’un détail, car parfois elle nous touche de plus près encore lorsqu’on est encore vivant.

Donc, le baptême vers lequel vous allez, c’est vers la résurrection et c’est pouvoir participer à la vie qu’a vécu Jésus. Comme le dit Saint-Paul, si vous avez une mort qui ressemble à la sienne, c’est à dire, si vous vivez de telle manière que vous allez jusqu’au bout de votre vie comme Lui l’a été jusqu’à la croix, alors vous aurez une résurrection qui ressemblera à la sienne. Vous toucherez du doigt déjà, ce qu’est la vie, la vraie vie. Ça n’enlèvera pas les problèmes, vous le savez bien, mais en tout cas, ça vous permettra de traverser tous les problèmes, toutes les “morts” possibles et d’en sortir vivant à sa manière.

Et c’est ce que vous allez devenir, des figures du Christ. Vous allez vous-même “devenir des Christ”, des chrétiens. Vous savez qu’être chrétien, ça veut dire être Christ. Vous allez devenir petit à petit, comme nous tous, “Christ”, avec le chemin qu’il reste toujours à faire.

Alors la parole de Dieu que nous avons entendu aujourd’hui, est vraiment adaptée et c’est pour cela qu’aujourd’hui se tient votre appel décisif. Vous entrez dans les 40 jours du désert comme Jésus a été appelé au désert. Vous avez vu que juste après son baptême par Jean Baptiste, il y a été amené. Pourquoi ? peut-être connaissez-vous le désert physique ou même le désert de la vie ? c’est là peut-être qu’on se retourne vers Dieu en L’appelant. Parce que dans le désert on manque de tout. La présence de Dieu c’est justement d’accepter qu’on ne fait pas la vie à nous tout seul. On ne génère pas la vie, on attend quelque chose de Dieu, donc il faut qu’on fasse l’expérience d’un vide dans nos vies pour espérer que Dieu vienne dans nos vies. S’il n’y a pas de vide, Dieu n’a rien à faire parmi nous. Alors le fait que Jésus soit amené au désert, nous permet de refaire l’expérience d’une forme de désert.

Est ce que Dieu nous manque vraiment dans notre vie ?
Parce qu’on peut “cadrer” Dieu. On va à la messe tous les dimanches, on a le créneau Dieu, on a le créneau chrétien et puis après on passe à autre chose. Mais est-ce qu’Il nous manque vraiment ? Est ce qu’on ne s’est pas trop habitués depuis 2000 ans à avoir sa présence ? Et puis finalement ça fait tellement de temps qu’Il est là, qu’on s’y est habitué et qu’Il ne nous manque pas vraiment, c’est une routine.

Vous catéchumènes, qui êtes nouveau, vous n’êtes pas dans la routine justement, vous êtes dans une expérience forte qu’avant vous ne connaissiez pas. Maintenant vous aspirez fortement à Le rencontrer. Dans tout ce que vous dites, dans vos lettres, dans vos expressions, vous aspirez vraiment à rencontrer Jésus.

Tout à l’heure, on a entendu dans le livre de la Genèse que Dieu a fait une alliance. Et bien il est en train de faire une alliance avec vous. Une alliance, c’est à dire un partenaire. Dans une alliance on est deux, il y a Lui et vous.
Lui, on sait ce qu’il fait. Il s’engage envers vous aujourd’hui, à vous accompagner jusqu’à la fin de votre vie et la relation que vous allez entretenir avec lui est vraiment une relation d’amour. Il veut absolument que vous deveniez des êtres humains. Quand je dis “devenir des êtres humains”, c’est un peu étrange parce qu’on se dit qu’on a une tête, deux jambes, deux bras et que l’on se tient debout… mais c’est bien plus que cela : Il veut vraiment qu’on soit à son image. C’est ça un être humain.
Vous savez, quand Ponce Pilate a dit “Voici l’homme” – Ecce Homo , il signifait “voici ce qu’est un être humain, voici le véritable être humain”. Et nous avons cette chance, cette grâce d’être appelé par Lui pour devenir comme Lui, un véritable être humain.

Depuis la création du monde il y a des milliards d’années, Dieu avait prévu qu’un jour, sur une petite planète bleue, autour d’un petit soleil, dans une petite galaxie dans l’univers, il y aurait des êtres humains, des êtres vivants, et pas que des plantes ou des animaux. Il a voulu qu’on soit à son image. Comme Dieu est amour justement, il a voulu qu’il y ait quelque chose d’autre à part Lui, et Il nous a créés. Nous avons donc un petit créneau. J’espère qu’on vivra plus de 100 ans (on verra !) mais ce n’est pas grand chose sur des milliards d’années. Et pourtant on pourra dire : « j’y étais, je l’ai vu. J’y étais, j’ai eu la chance de connaître cette terre et c’est un bonheur ».

Après des milliers et des milliards d’êtres humains, nous y sommes aujourd’hui et nous le voyons. Et ça, c’est vraiment l’Alliance qu’Il fait avec nous.
En même temps, Il a vu, et nous l’avons vu aussi, qu’avoir créé des êtres humains, ce n’est pas si simple et parfois, quand on voit ce que font ces êtres humains, ce que nous sommes, on se demande ; « Est ce qu’Il a bien fait de créer les  êtres humains ? ».
Lui ne renie pas son alliance. Quoi que nous ayons fait dans notre vie, quoi que vous ayez fait, qui que vous soyez, Il est en train de croire en nous et Il est en train de croire en vous. Il est en train de dire : « Oui, je compte sur vous, je ne le ferai pas sans vous et je fais une alliance avec vous comme je l’ai faite avec Noé dans le livre de la Genèse ».
La petite différence c’est que Noé, lorsqu’il est entré dans l’arche, n’a pas eu le réflexe de dire «Les autres qu’est ce qu’ils vont devenir  ?”  – Vous savez que les autres ont tous été noyés ? On dit qu’il n’en est resté que 8- Noé  n’a pas eu le réflexe de dire « et les autres ? ». Il a été sauvé, tant mieux pour lui, mais ça ne suffit pas.
Il fallait qu’à un moment donné, quelqu’un dise, « et les autres ? ». C’est Jésus qui l’a fait. Il a été le seul à se retourner en disant, “Je ne les laisserai pas tomber”. Déjà 8, c’était pas mal, mais le seul qui a dit “je ne les laisserai pas tomber”, c’est Jésus Christ, c’est Dieu en personne. Et aujourd’hui Il nous invite à Le suivre de cette manière là.

Non seulement vous allez vers le baptême, mais vous aurez une mission. « Je ne les laisserai pas tomber”. Je deviens moi-même le responsable, la responsable des autres.
Je vous invite vraiment à rentrer dans cette dynamique.

Vous avez 40 jours maintenant pour faire ce grand chemin de conversion. Vous l’avez déjà commencé et vous allez maintenant suivre le Christ. Ne Le laissez pas tomber. Petit à petit, Il va entrer dans la solitude. Il va vraiment entrer dans un moment de grande solitude, mais parce qu’Il ne veut pas nous laisser tomber, Il va aller rejoindre tous ceux qui sont perdus, à commencer par vous même.

Vos noms sont inscrits dans le cœur de Dieu, maintenant ces noms vont grandir et vous allez continuer à toucher le bonheur qu’il y a de devenir chrétien. Et nous qui sommes déjà chrétiens depuis longtemps, ayons encore ce bonheur de découvrir qu’être chrétiens, il n’y a pas mieux que ça et sans Jésus Christ on ne peut rien faire.

Le monde a beau essayer – on a essayé toutes les institutions, l’ONU, des pourparlers, des traités, etc. – ça ne fonctionne pas si Jésus Christ n’est pas présent.
On manque de chrétiens actifs dans le monde. Où sont les chrétiens à l’ONU ? Où sont les chrétiens en Ukraine ? Où sont les chrétiens en Russie ? Où sont les chrétiens en Palestine. Où sont-ils les chrétiens qui permettent à Jésus de sauver le monde ? Et bien, c’est nous. À nous de le faire.

Et maintenant, demandez au Seigneur quelle est votre vocation. Le soir de votre baptême, vous sentirez que Dieu compte sur vous, et vous aime tellement qu’il fait une alliance avec vous et qu’il compte sur nous tous maintenant pour que Jésus Christ soit présent jusqu’à la fin du monde. Il vous donnera pour cela son Esprit Saint.

Amen.

† Jean -Louis Balsa
Archevêque d’Albi

En l’église St Pierre, Gaillac – Dimanche 18 février 2024