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Fêtes de sainte Cécile

Homélie de Monseigneur Jean Legrez

Frères et sœurs,

Célébrer sainte Cécile, patronne du diocèse et patronne de cette cathédrale, c’est véritablement, comme les quelques versets de l’épître aux Éphésiens que nous venons d’entendre peuvent nous y aider, nous rappeler et prendre conscience davantage que nous sommes « concitoyens des saints » et « membres de la famille de Dieu ». Par l’Esprit Saint, reçu au jour de notre confirmation, nous appartenons au corps du Christ, nous en sommes les membres visibles aujourd’hui. Déjà rendus saints par l’Esprit, nous sommes appelés, tout au long de notre passage sur la terre, à grandir en sainteté. « Tous ceux qui croient au Christ, quels que soient leur condition et leur état de vie, sont appelés par Dieu, chacun dans sa route, à une sainteté dont la perfection est celle même du Père », nous a rappelé le concile Vatican II (Lumen Gentium, n° 11).

Plus récemment, dans son exhortation apostolique « Sur l’appel à la sainteté dans le monde actuel », le Pape François affirme : « Le dessein du Père, c’est le Christ et nous en Lui ». En dernière analyse, c’est le Christ aimant en nous, car « la sainteté n’est rien d’autre que la charité pleinement vécue ». C’est pourquoi « la mesure de la sainteté est donnée par la stature que le Christ atteint en nous, par la mesure dans laquelle, avec la force de l’Esprit Saint, nous modelons toute notre vie sur la sienne. Ainsi, chaque saint est un message que l’Esprit Saint puise dans la richesse de Jésus Christ et offre à son peuple ».

Sainte Cécile, une martyre romaine de l’Église primitive dont l’histoire exacte – il faut le reconnaître – est pleine d’incertitude, a été donnée comme patronne à la cathédrale d’Albi dès le début du Xe siècle. Finalement, ce n’est qu’au Moyen-Âge, au XIIIe siècle, qu’une vie de sainte Cécile a été rédigée. Il me semble, en l’occurrence, que l’essentiel n’est pas à chercher dans la vérité historique, mais dans  la contemplation d’une vie donnée jusqu’au martyr. En effet, comme saint Jean-Paul II l’a constaté : « les martyrs sont un héritage qui nous parle d’une voix plus forte que celle des fauteurs de division », et ils sont nombreux.

À notre époque où la chasteté, aussi bien dans le mariage que dans le célibat, est souvent ridiculisée, sans parler de la virginité qui a été reléguée au musée des souvenirs du passé, il peut être salutaire, avec l’aide de l’histoire de sainte Cécile, que la radicalité évangélique dans le domaine de la vie affective et de la sexualité nous soit rappelée. Les disciples de Jésus, eux-mêmes, ont eu du mal à accepter son enseignement sur le chapitre. Le Seigneur finit par leur dire : « Celui qui peut comprendre, qu’il comprenne ! » (Mt 19, 12).

En se donnant totalement au Christ dans la virginité, Cécile a été source de vie divine pour son entourage. Je ne sais pas si vous vous souvenez, pour les plus anciens, mais il était d’usage d’appeler une religieuse : « ma Mère ». Considérée comme « vierge consacrée », une religieuse est mystérieusement porteuse de vie – cela n’a pas changé, même si aujourd’hui on est plus sensible à la fraternité et on appelle une religieuse : « ma Sœur ». En se donnant totalement au Christ dans la virginité, Cécile a été source de vie divine pour plusieurs. En refusant, au soir de ses noces, de se donner à son époux en raison de son vœu de virginité, Cécile est devenue sa mère selon la grâce. Valérien, son jeune époux, va découvrir, en raison de la fidélité de Cécile, le vrai Dieu et recevoir le baptême. Il va même faire connaître à son propre frère Tiburce, la vérité. Tous deux, condamnés à mort en raison de leur foi toute jeune, toute nouvelle, vont amener leur gardien à confesser le vrai Dieu. Et voici que Cécile va ensevelir les trois morts avant de subir elle-même le martyr.

De cette légende hagiographique et en cette journée mondiale de la pauvreté, nous pouvons retenir qu’en étant configuré au Christ en croix, tout martyr fait l’expérience de la plus grande des pauvretés. En donnant sa vie au Christ, le martyr est dépouillé de tous ses biens, non seulement de ses biens matériels, mais aussi et surtout de sa dignité humaine. Comme le Christ qui, par son sacrifice, obtient le salut du monde, le martyr obtient, en union avec le Sauveur, de multiples grâces pour notre humanité rachetée. Toute l’histoire de l’Église, jusqu’à aujourd’hui, montre que les martyrs sont semence de chrétiens.

Faire confiance à la parole du Maître, après l’avoir écouté, tenter jour après jour de la mettre en pratique, et dépendre de lui, libère des esclavages de toutes sortes et conduit à reconnaître notre dignité d’enfants de Dieu. « Dans la mesure où il se sanctifie, chaque chrétien devient plus fécond pour le monde », nous rappelle le Pape François. Que sainte Cécile intercède pour chaque diocésain et nous obtienne la grâce d’être de plus en plus fidèle à l’enseignement du Christ, ainsi que la capacité, comme elle a su le faire, de partager notre amitié pour le Sauveur avec ceux et celles qui ne le connaissent pas encore et qui, aujourd’hui, sont de plus en plus nombreux !

Au moment de ses noces, Cécile chantait intérieurement, louait son Seigneur, ce Roc qu’est le Christ, son seul soutien. C’est pour cette raison qu’elle est devenue patronne des musiciens ; qu’elle nous obtienne aussi la grâce de savoir aujourd’hui chanter les louanges du Seigneur à la face du monde avec ferveur, avec fidélité et avec beauté !

Amen

† Jean Legrez, o.p.
Archevêque d’Albi