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Ils quittent bientôt le Lesotho ! Sentiments et réflexion…

Baptiste et Laëtitia termineront leurs missions en juillet prochain.

Dans leur missive du 1er juin, avant d’évoquer les nouvelles du trimestre, ils partagent :
« Nos cœurs sont à présent partagés entre la hâte du retour et le sentiment de laisser derrière-soi une expérience unique qui nous aura transformés, éprouvés, enrichis.

Étrange ambivalence… A ce stade, notre préoccupation première est la transmission… Grand défi pour tout missionnaire qui se pose légitimement la question de l’utilité et de la suite de son entreprise… Grande leçon d’humilité également puisqu’il faut remettre à d’autres la tâche qui nous a été confiée et pour laquelle nous nous sommes beaucoup investis. 

La relève à la Bakery : Mme Thato, en apprentissage pour la confection des boîtes de biscuits

Ce passage est juste et nécessaire : il nous rappelle que nous ne sommes que des intendants et non des propriétaires…à l’instar des biens et des talents que la Vie nous confie…   Nous remettons dès à présent à vos prières nos futurs successeurs. »

Formation en cours

et visite ciblée des patients

Et aux amis et parrains, ils redisent avec force :

« Encore une fois, nous vous exprimons toute notre gratitude : votre fidélité sans faille manifestée par vos dons, prières ou témoignages d’affection nous aura poussés vers l’avant ! Tel le vent dans nos voiles…Sans vous, notre mission n’aurait probablement pas eu cette envergure !
Que Dieu vous bénisse ! »

* * * * *

À l’école de la parabole des Talents (Mt 25, 14-30), découvrons une de leurs petites réflexions de fin de mission : « Intendant ou propriétaire ? »

 » Un sujet sur lequel nous avons été particulièrement interpelés, bousculés en mission, c’est la notion de propriété. En Europe, il nous parait normal de bien étiqueter les choses, de délimiter ou clôturer nos terrains :
chaque crayon de couleur à son propriétaire et il n’est pas question de franchir une clôture sans montrer patte blanche.
Être propriétaire, c’est avoir la liberté et le monopôle de l’usage d’un bien et nous grandissons depuis l’enfance avec cette conception qui est très présente :
« Tu peux prêter à ton frère mais ce jeu reste à toi… » ;
«Ne va pas cueillir les fruits du voisin, exceptés ceux du bon côté du mur… ».

Il est vrai que la découverte initiale du Lesotho, paysage sauvage presque sans barrière (uniquement végétale), nous avait frappés en arrivant et cette différence aurait dû nous mettre la puce à l’oreille… 

Des espaces infinis…

Que de fois avons-nous été interloqués de découvrir qu’en Afrique cette définition de la propriété n’est pas la même, occasionnant pour nous au début des gênes, des grincements de dents, des commentaires… 

Ici quand tu as, c’est pour partager !
Et comme les blancs ont beaucoup reçu, ils doivent beaucoup partager.

Quelques exemples :
que de fois avons-nous vu des gens inconnus de l’hôpital assis sur nos fauteuils d’extérieur en train de capter notre wifi tout en dégustant des chips, ou carrément prenant un café dans notre cuisine en papotant avec la cuisinière.

Cela concerne aussi le chargeur de portable emprunté par quelqu’un qui en avait vraiment besoin mais qui ne revient jamais (t’es content d’en avoir embarqué trois dans ta valise, au cas où…), la nounou qui va chercher ton fiston avec ton chapeau préféré sur la tête, les jeux des enfants entreposés à l’extérieur qui se volatilisent puis reviennent à la fin d’un weekend ou de vacances, ou encore le sac de nourriture donnée pour dépanner un travailleur dans l’urgence mais qui n’est finalement jamais payé.

La première année, il est vrai que cela nous dérangeait : le don était toujours à sens unique et pour la plupart sans demande préalable…
Tous ces « emprunteurs », n’abusaient-ils pas de notre gentillesse ?

Et puis, nous avons repensé aux enseignements de notre préparation Fidesco et nous avons compris !!!

« Que donnes-tu que tu n’aies reçu ??? »

Pusilé, une petite orpheline épileptique habituée à être lavée et vêtue à l’hôpital

En Afrique, la misère et la croyance religieuse sont telles que le partage est perçu comme normal voire obligatoire face aux inégalités de la vie. 

Celui qui a reçu de Dieu donne à celui qui n’a rien et cette solidarité s’exprime dans tous les pans de la société africaine.

Elle permet ainsi de restituer une forme de justice, imparfaite certes mais préférable à l’égoïsme.

Combien de travailleurs africains- ayant eu la chance de trouver un emploi stable- soutiennent leur famille en envoyant de l’argent pour nourrir le cousin sans boulot, pour soigner la tante malade ou pour payer l’école des neveux…. ???

Cette solidarité est omniprésente et elle nous fait forcément réfléchir, nous qui avons pris l’habitude de « posséder personnellement» et non collectivement.

Nous avons donc changé notre regard et nos mains, au lieu de se crisper sur des biens dont on attendrait le retour, se sont ouvertes un peu plus généreusement. 

Quel mérite a- t-on à donner quand nous ne vivons jamais dans le besoin et que nous côtoyons le superflu ? 

Il en va de même avec le temps consacré à notre mission. On pourrait se dire : « Deux ans donnés, après tout, ce n’est pas rien ? » Et pourtant, quand on comprend toute la détresse exprimée, palpée, vécue ici au quotidien, on réalise que ces deux années sont peu de choses pour tenter d’y faire face.

A l’école de la mission, nous avons finalement compris qu’il fallait arrêter de contrôler nos vies comme des propriétaires mais plutôt de les vivre en « bon gestionnaire ».

Que fais- je de mon temps, de ma vie, de mes talents, de mes biens ?
Garde-les je pour mon propre usage ou fais-je le choix de les mettre au service d’un monde meilleur, d’une plus grande justice ?
Dieu est à nos yeux l’Unique propriétaire et notre vie est le bien le plus précieux qu’Il nous ait confié.
Sachons la faire fructifier. »