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Kongolo et Kinshasa, puis Albi et Carros: Sr Marie-Élise, 70 ans de profession !

Sr Marie-Élise de l’Enfant-Jésus (Bambina-Marie Kabondo), était née le 8 septembre 1931 en République démocratique du Congo dans le territoire de Kongolo, et elle fut baptisée en cette fête de la Nativité de Notre Dame.

Merci à ses sœurs du Carmel de Carros-Albi de nous partager son parcours de vie :

« Son père  Stéphane, étant orphelin, avait été recueilli par les Spiritains qui assurèrent son éducation.
Sa maman Élisabeth, était fille d’un chef de tribu, celui-ci était de religion traditionnelle patriarcale et polygame ; il lui permit pourtant de fréquenter la mission et elle fut baptisée.

C’est là qu’elle rencontra Stéphane, ils s’aimaient profondément et se marièrent, fondant un foyer catholique, très enraciné dans leur foi grâce au travail des missionnaires. Ils eurent 12 enfants, notre sœur se trouvant au rang des aînés.

Elle nous racontait souvent des souvenirs de son enfance : son papa avait un faible pour sa petite Bambina ; sa maman, asthmatique, a dû pourtant la confier aux soins d’une nourrice pour un temps et, à l’âge de 6 ans, la mettre pensionnaire à l’internat tenu par les religieuses Filles de la Croix, selon la coutume dans cette mission pour scolariser les petites filles.

C’est là qu’un Père Spiritain belge, le P. Augustin Bouve (qui deviendra ensuite évêque et dont elle nous parlait souvent) l’« adopta » et se chargea de son éducation sur le plan spirituel comme au plan matériel.

Copyright Caritas Kongolo

 

Très tôt elle manifesta le désir d’être religieuse, carmélite de surcroît, mais sa famille s’y opposa, particulièrement son père qui l’aimait tendrement et n’acceptait pas cette vocation pour elle.
Alors, pour pouvoir répondre à l’appel et réaliser malgré tout sa vocation, elle a dû affronter une dure situation et s’échapper de la maison paternelle.

C’est à 13 ans qu’elle entra dans le juvénat des Filles de la Croix et ensuite dans la toute nouvelle Congrégation autochtone des Sœurs du Cœur immaculé de Marie de Kongolo, fondée par Mgr Bouve, enfouissant son désir d’être carmélite puisqu’on lui avait dit qu’il n’y avait pas de Carmel sur sa terre natale.

Elle fit profession le 22 août 1950. Entretemps ses parents acceptèrent enfin le choix de Dieu sur elle.

 Elle fut envoyée en Belgique pour des études supérieures afin de se consacrer à l’enseignement ; elle deviendra directrice d’école et se donnera à fond dans sa tâche au cours des années qui suivront.

Mais parlons aussi d’un épisode de sa vie qui la marqua profondément : c’est le massacre de Kongolo.
Elle se trouva, avec d’autres religieuses, séquestrée et promise à la mort quand, fin décembre 1961, les soldats de l’armée nationale congolaise reprirent la ville de Kongolo aux gendarmes katangais.

Les missionnaires spiritains qui dirigeaient le petit séminaire de la ville furent arrêtés le 31 décembre et 19 d’entre eux, qu’on appelle les martyrs de Kongolo, passés par les armes le jour de l’an 1962 car soupçonnés d’être en faveur de l’indépendance du Katanga.
Sr Marie-Élise se trouvait donc sur place et témoin de ce massacre.
Et elle en réchappa par miracle, plus affermie que jamais dans sa foi et prête à la défendre quoi qu’il puisse lui arriver.

Elle ne craignait pas de tenir tête aux militaires et de se battre même quand il s’agissait de s’opposer à leurs méfaits, aux pillages, à l’injustice, sous la dictature de Mobutu.

Elle qui se disait timide dans son enfance a fait preuve d’un mâle courage à bien des occasions : n’a-t-elle pas bravé des soldats pour pouvoir aller chercher dans une église, la Sainte Réserve Eucharistique et la soustraire à la profanation ?
Elle s’est opposée à la destruction d’une Statue de la Vierge et bien d’autres faits qu’elle nous partageait en récréation.

Au cœur de tous ces événements, elle continuait d’entendre retentir en elle l’appel du Carmel.
Comment réaliser un tel désir ?
Elle en parlait à Mgr Bouve qui ne consentait pas à son départ pour une Communauté contemplative alors qu’elle était si précieuse dans l’enseignement et les écoles.

Mais arriva le moment pour lui de se retirer dans sa Belgique natale après la nomination d’un évêque congolais à la tête du diocèse, et c’est alors, juste avant de partir, qu’il lui donna la permission requise pour pouvoir réaliser son vœu le plus cher : elle pourrait frapper à la porte du Carmel de Kinshasa.

Mais auparavant, elle allait devoir essuyer de grosses difficultés de la part du successeur de Mgr Bouve qui n’acceptait pas plus que lui qu’elle s’en aille.
Elle passa ainsi par bien des épreuves avant de pouvoir entrer au Carmel et y devenir carmélite.

Elle fit profession le 27 août 1979.

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Même au Carmel elle eut bien des fois l’occasion de réagir à diverses situations difficiles.
Elle ne pouvait ni retenir sa langue ni taire la vérité face à des injustices, ou quand il fallait défendre les droits légitimes des pauvres et des petits et plus encore quand sa foi était en jeu.
Elle fut élue prieure vers les années 1990-91.

 

Puis elle demanda à rejoindre un Carmel en France pour raison de santé. C’est le P. Damase Zuazua qui la dirigea vers notre Carmel d’Albi.
Et c’est le 5 juin 1993 qu’elle nous arriva.
Elle n’eut aucune difficulté à s’intégrer dans notre Communauté et à y trouver pleinement sa place pour les 27 ans que le Carmel d’Albi aurait encore à vivre.

Elle aidait à la fabrication des pains d’autel, et dans bien d’autres offices, entre autre elle consacra beaucoup de temps au repassage.
Elle aimait broder des napperons, et le faisait à merveille ; elle rendait de multiples services.

Sa famille tenait une grande place dans son cœur.
Elle les portait dans sa prière et n’oubliait pas son rôle d’aînée, se sentant responsable des uns et des autres.
Elle mettait tout en œuvre pour pouvoir les aider selon les possibilités et les besoins.

Et quand des intentions de prière lui étaient portées ou des problèmes difficiles à résoudre, c’est au Divin Enfant qu’elle confiait tout cela, lui écrivant ses requêtes pour les glisser sous sa petite statuette de Prague qu’elle avait dans sa cellule.

Nous avons fêté ses Noces d’Or en l’An 2000 à Albi et ses 70 ans de profession à Carros (diocèse de Nice).

Sa santé connaissait bien des accrocs à certains moments et déjà, dès son arrivée en France elle avait dû subir une opération.

Les derniers mois passés à Albi et la fermeture du monastère durent l’éprouver plus qu’elle ne le laissait paraître et, arrivée à Carros, son état s’est à nouveau dégradé : ulcère à la jambe et difficulté pour marcher au point de prendre un fauteuil roulant, alors qu’auparavant il suffisait de le lui proposer pour qu’elle retrouve des jambes et file à vive allure sans demander son reste…

Mais le cœur était aussi bien fatigué et l’heure de la Rencontre allait sonner : la voix de l’Époux se fit entendre en ce mercredi des Cendres.
Après quelques 8 mois passés dans notre Carmel de Carros et un temps de désert, de solitude, et de suprême dépouillement à l’hôpital, qui fut sans doute pour elle bien douloureux, – son Chemin de Croix -, elle a pu faire sa Pâque et rejoindre Celui qu’elle avait tant aimé depuis sa plus tendre enfance : JÉSUS !

Ce 17 février en effet, alors qu’elle nous avait été ramenée au Carmel, dans l’après-midi, c’est vers 23h15 que le Seigneur est venu la chercher : elle est « partie » dans la paix vers son Seigneur, sans aucune agonie, tandis qu’une sœur récitait le chapelet de la Miséricorde…

Nous avons été vraiment stupéfaites qu’elle parte si vite et dans une telle douceur. Ses derniers mots ont été : « Jésus, Jésus !… » et « Merci ! »

Ses obsèques ont eu lieu le 23 février dans la chapelle du Carmel. Nous la recommandons à vos prières sachant combien elle vous en sera reconnaissante !» (7 mars 2021)