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Homélie pour les vœux perpétuels de Sœur Laure

Frères et sœurs,

Vous l’avez entendu déjà le prophète Jérémie reconnaissait avoir été séduit par la Parole du Seigneur. « Elle était comme un feu brûlant dans mon cœur, elle était enfermée dans mes os », affirme le prophète. Ceci signifie que la Parole du Seigneur demeure au plus intime de son être, de sa personne, et qu’elle l’anime sans cesse. En quelques mots, Jérémie décrit ici une expérience intérieure décisive, alors qu’il se heurte à toutes sortes de difficultés dans l’exercice de son ministère prophétique. Dans l’angoisse, tenté d’abandonner, le prophète ne peut oublier qu’il a été séduit. Il peut donc rester confiant.

Dans l’Évangile qui nous rapporte l’entretien de Jésus avec Nicodème, nous assistons à un dialogue entre la Parole faite chair, Jésus, le Fils de l’homme, c’est-à-dire le Messie attendu par Israël, et un pharisien. Si Jésus est parfois sévère avec les pharisiens, c’est parce qu’ils étaient parmi les juifs de son temps de ceux qui étaient les mieux préparés à l’accueil du Messie, en raison de leur culture religieuse, en particulier leur connaissance des Écritures, ainsi que de leur vie pieuse et vertueuse. Nicodème, comme Paul plus tard, est un pharisien qui cherche à percer l’identité de ce Rabbi qui enseigne avec assurance et accomplit des signes attestant une assistance divine. Il désire savoir : « Qui est cet homme ? ». Discrètement, de nuit, il vient à la rencontre de Jésus. Jésus ne répond pas à la question de Nicodème et lui parle de naître d’en haut, c’est-à-dire de Dieu. Restant à un plan naturel, Nicodème ne voit pas comment la chose est possible. Il ne comprend pas. Jésus insiste et précise que cette nouvelle naissance est l’œuvre de l’eau et de l’Esprit. Toute la tradition a vu dans cette annonce l’esquisse du baptême chrétien qui bientôt communiquera la vie éternelle, la vie divine, à ceux et celles qui placeront leur confiance en Jésus Ressuscité, reconnu comme Seigneur et Sauveur de tous les hommes.

Nicodème est dépassé, il ne comprend toujours pas. Avec un certain humour le Seigneur Jésus le bouscule : « Tu es maître en Israël et tu ignores ces choses-là ? ». En employant un pluriel de  de majesté, expression de sa divinité, Jésus se présente comme le témoin du monde divin duquel il vient pour y introduire l’humanité entière. En effet, ceux et celles qui croiront en lui en recevant l’Esprit Saint, naîtront d’en haut et entreront dans la vie éternelle. Le salut que Jésus obtiendra à travers sa Pâques en faveur de l’humanité restaurera l’alliance désirée de toute éternité par le Père en faveur de ses enfants. Le baptême est un mystère d’alliance qui permet à un être humain de renaître dans la puissance de l’Esprit Saint pour devenir un enfant du Père à l’image du Fils Premier-né, Jésus Christ, et ainsi d’être introduit dans la vie éternelle qui consiste à connaître le Père et son envoyé Jésus Christ. La plénitude de cette vie éternelle nous sera donnée au-delà de la mort, lorsque l’amour infini de la Trinité nous sera dévoilé et que nous y serons plongés pour toujours.

Sœur Laure, la profession religieuse qui conduit à vivre son baptême avec une radicalité insigne, est le résultat d’un appel particulier coextensif à la durée de notre vie sur cette terre, qui demande une réponse à donner jour après jour. Dans son exhortation sur la vie consacrée, le saint Pape Jean-Paul II écrivait : « La vocation des personnes consacrées qui consiste à chercher avant tout le Royaume de Dieu, est en priorité un appel à la pleine conversion par le renoncement à soi-même pour vivre entièrement du Seigneur, afin que Dieu soit tout en tous. Appelés à contempler le visage transfiguré du Christ et en être les témoins, les consacrés sont appelés à une existence transfigurée ». Magnifique programme ! Mais gardons les pieds sur terre. Cette existence transfigurée ne dispense pas des combats, des épreuves, des échecs, même des chutes. Lors de la transfiguration une fenêtre sur l’éternité s’était ouverte. Pierre souhaitait que cela dure et en même temps, quelques instants plus tard, une crainte révérencielle saisit les trois apôtres entendant la voix du Père… Alors « Jésus s’approchant, les toucha et leur dit :  » Relevez-vous, n’ayez pas peur  » (Mt 17, 7).

Sœur Laure, n’ayez pas peur ! De même que le baptême est un mystère d’alliance, la profession religieuse comporte une dimension sponsale affirmée par toute la tradition de l’Église. Nous affirmons que le Christ est l’époux de l’Église. Plus précisément, l’époux de chaque âme de baptisé. La personne qui illustre parfaitement cette vocation d’épouse est la Vierge Marie. Aussi paradoxale que cela puisse paraître, totalement donnée cette épouse immaculée devient mère de Dieu : icône et modèle de l’Église qui engendre les enfants de Dieu. Toujours dans « Vita consecrata » on peut lire : « Marie est en effet un exemple sublime de consécration parfaite par sa plein appartenance à Dieu et par le don total d’elle-même. Choisie par le Seigneur, qui a voulu accomplir en elle le mystère de l’Incarnation, elle rappelle aux consacrés l’initiative de Dieu. En même temps, ayant donné son assentiment à la Parole divine, qui s’est faite chair en elle, Marie se situe comme le modèle de l’accueil de la grâce par la créature humaine ».

Que l’Immaculée soit pour vous, Sœur Laure, un modèle d’épouse aimante ! Qu’elle vous obtienne de demeurer chaque jour dans l’intimité de la Parole faite chair, le Christ, époux des âmes saintes, c’est-à-dire des baptisés ! Alors, à la suite de sainte Jeanne-Émilie de Villeneuve et avec l’aide de son intercession, vous serez à Dieu seul et capable de répondre aux cris des pauvres d’aujourd’hui.

Amen

† Jean Legrez, o.p.
Archevêque d’Albi

 

En la cathédrale Saint-Benoît de Castres, le samedi 3 octobre 2020
1ère lecture : Jr 20, 7a.9
Psaume : 118
Évangile : Jn 3, 1-17

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