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Homélie de l’appel décisif au baptême des catéchumènes

Frères et sœurs,

La liturgie de ce premier dimanche du carême nous offre un véritable survol de l’histoire du Salut depuis l’origine de l’humanité. La première lecture tirée du livre de la Genèse, nous rapporte la création de l’homme par Dieu. Dieu crée l’homme et la femme à sa ressemblance et place le premier couple humain dans le jardin d’Éden.

Quant à nous, nous avons l’habitude des jardins. N’oublions pas que ce récit est né en Orient. Il faut plutôt s’imaginer dans le désert qu’en Normandie ! L’oasis est le lieu de la verdure, jardin au milieu du désert. Nous ne nous rendons pas bien compte de ce que représente ce lieu où il y a de l’eau, des fleurs, des oiseaux et, finalement, où il fait bon vivre. Dans ce fameux jardin d’Éden – la Genèse le dit dans un autre passage que celui que nous avons entendu – Dieu se promenait et il y rencontrait l’homme. Nous pouvons comprendre, à partir de ces expressions symboliques, que Dieu crée l’homme et la femme pour qu’ils vivent en sa compagnie.

L’homme et la femme vont en décider autrement. Il y a ce fameux serpent, tout cela est fort mystérieux. Un mystère est une réalité que nous n’arrivons jamais à saisir dans sa totalité. Dans la Bible, le serpent sera appelé « le diviseur ». Il porte bien son nom puisqu’il va introduire la division dans l’amitié entre le Créateur et ses créatures, alors que Dieu crée l’homme pour qu’il vive dans son amitié. En influençant le premier couple humain, le diviseur va faire en sorte que cette relation d’amitié cesse. L’homme est sous l’influence du Démon, le diviseur est un autre nom du Démon, appelé ainsi ailleurs dans les Écritures ; c’est aussi le père du mensonge, qui porte bien son nom ! Là, précisément, il ment à l’homme en lui faisant croire que s’il mange de ce fruit dont le Créateur lui a dit de ne pas manger, finalement, il ne sera plus dépendant de son Créateur. Il sera indépendant, donc il sera comme Dieu. Un peu de bon sens nous fait comprendre que celui qui crée, quelle que soit la création, une machine, un objet, ce qui est créé dépend toujours de celui qui l’a créé. La machine ne peut pas prendre la place de celui qui l’a façonnée. C’est ce mensonge-là dans lequel le démon introduit le premier couple humain. La désobéissance va introduire une rupture avec le Créateur et, de fait, supprimer une dépendance qui était une expression d’amour.

Aujourd’hui, être dépendant, a très mauvaise presse. Parmi vous je vois un bon nombre de couples. J’aimerais savoir, si vous vous aimez, si vous n’êtes pas dépendants dans l’amour l’un de l’autre ? C’est une dépendance admirable, heureuse, magnifique. C’est cela, justement, que le premier homme et que la première femme n’avaient pas compris. Trompés en prenant leur indépendance, ils pensent trouver par eux-mêmes le sens de leur existence. C’est là l’erreur. Finalement, comme dit le texte, ils vont manger de ce fruit défendu et le résultat, au lieu d’être comme Dieu, ils vont découvrir qu’ils sont nus. Qu’est-ce que cela signifie ? Les rabbins l’expliquent très bien : jusqu’au moment du péché, l’homme et la femme étaient enveloppés dans la grâce de Dieu dans son amour. À partir du moment où ils rompent avec leur Créateur, ils tombent dans la solitude et la solitude des humains que nous connaissons tous.

Cette solitude est d’autant plus pénible quand on ne connaît pas Dieu. Voilà ce qu’est la nudité. Il faudra attendre le Sauveur pour que l’être humain soit à nouveau revêtu de la grâce divine. « Vous qui avez été baptisés – chantons-nous au jour de Pâques – vous avez revêtu le Christ », vous êtes à nouveau enveloppés par la grâce divine. Vous pouvez vivre, dès lors, selon le plan initial du Créateur, dans l’intimité du Père, du Fils et du Saint Esprit. Frères et sœurs, catéchumènes, au jour de votre baptême, vous sera remis le vêtement blanc qui sera le signe que la grâce, la vie divine vous enveloppe et vous pourrez dès lors vivre dans une relation réelle avec Dieu, le Créateur, le Sauveur et le Sanctificateur.

 

L’Évangile nous a présenté le Christ tenté au désert pendant quarante jours. Ces quarante jours sont à l’origine de cette sainte quarantaine que nous appelons le carême. Durant ce temps, les catéchumènes se préparent ultimement à la réception du baptême et les baptisés de plus vieille date sont invités à mener le combat spirituel avec une ferveur renouvelée.

Saint Augustin, dans une homélie, s’exprime ainsi, en commentant ce passage de l’Évangile : « Le Christ est tenté par le diable ! Dans le Christ, c’est toi qui était tenté, parce que le Christ tenait de toi sa chair, pour te donner le salut ; il tenait de toi la mort, pour te donner la vie ; il tenait de toi les outrages, pour te donner les honneurs ; donc il tenait de toi la tentation, pour te donner la victoire ». Frères et sœurs, le Christ est réellement tenté au désert où il connaît l’épuisement ; le désert est véritablement un lieu éprouvant pour le corps et pour le moral, en raison de la solitude dans laquelle on peut s’y trouver. Cet état de faiblesse dans lequel le désert nous plonge est le moment favorable pour le tentateur d’inviter celui qu’il tente et parvenir, pense-t-il, à le vaincre. Les tentations que connaît le Christ sont des tentations que nous connaissons tous. Le désir de la satiété, le pouvoir, le désir de la possession ; autant de domaines où tous, à un moment ou à un autre de notre existence, nous sommes tentés.

Ce qu’il faut retenir avant tout de cet Évangile, c’est la manière dont le Christ s’oppose à la tentation par la Parole de Dieu. Au lieu de se fier au tentateur, il fait confiance à la Parole divine, il fait confiance à son Père. C’est véritablement la manière dont nous devons lutter en opposant à la tentation l’écoute de la Parole de Dieu, qui est le seul moyen de demeurer en compagnie de Dieu, dans une relation heureuse avec le Créateur.

Aujourd’hui, que nous soyons un catéchumène ou un baptisé d’ancienne date, je crois qu’en ce premier dimanche du carême, nous pouvons demander les uns pour les autres d’acquérir, avec l’aide du Seigneur, ce réflexe salutaire d’avoir recours à la Parole de Dieu lorsque nous sommes tentés. Tel le moyen indiqué par le Christ pour remporter la victoire sur le Mal.

Amen

† Jean Legrez, o.p.
Archevêque d’Albi

En la cathédrale Sainte-Cécile, Albi – dimanche 26 février 2023

1ère lecture : Gn 2, 7-9 ; 3, 1-7a
Psaume : 50, 3-4, 5-6ab, 12-13, 14.17
2ème lecture : Rm 5, 12-19
Évangile : Rm 5, 12.17-19

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