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Homélie de la messe mémorielle pour les victimes d’agressions sexuelles dans l’Église

Frères et sœurs,

Dans le passage de l’évangile selon saint Luc sont évoqués plusieurs évènements dramatiques : un massacre commandité par Pilate et la chute de la tour de Siloë qui provoqua la mort de dix-huit personnes. Autant de situations qui placent les contemporains de Jésus devant le scandale du mal. Malheureusement, nous le savons, nous pourrions allonger la liste en ces jours où une guerre fratricide entraine la mort d’innocents et en ce jour où nous prions particulièrement pour les victimes d’abus.

Face à l’horreur du mal qui se réalise de manières différentes au cours de l’histoire de l’humanité, Jésus ne fait aucun discours explicatif. Il invite à la conversion : « Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même ». La parabole du figuier stérile nous décrit l’attitude de Dieu face à l’humanité parfois si cruelle et mauvaise, face, en un mot, au pécheur. Dieu ne détruit pas l’homme mauvais. Le vigneron ne coupera pas l’arbre ; l’arbre qui nous représente, reste debout. Dieu face à l’homme mauvais patiente. Il lui propose des remèdes, comme l’engrais pour l’arbre, afin qu’il finisse par fructifier. Notre Dieu a une patience, une miséricorde sans limite, que nous ne parvenons même pas à imaginer. Avec la grâce, tout pécheur peut emprunter un chemin de sainteté, en un mot peut se convertir.

Frères et sœurs, vous l’avez entendu à la lecture du passage de l’Exode, avant même de révéler son nom à Moïse, le Seigneur commence par lui manifester sa compassion à l’égard du peuple : « J’ai vu la misère de mon peuple ». Face aux maux que connaît l’humanité, la Révélation dans son ensemble, c’est-à-dire la Bible, et ultimement la vie entière du Christ nous montrent que notre Dieu n’est qu’amour miséricordieux. Avec patience et longanimité, le Seigneur propose à tous de s’ouvrir librement à son amour. Les évènements douloureux auxquels nous sommes tous confrontés à différents moments de notre existence, que ce soit les catastrophes naturelles ou la violence humaine sous toutes ses formes, deviennent des avertissements pour accueillir l’amour dont Dieu veut combler chacun de ses enfants de toute éternité. Ce ne sont pas, comme on l’entend souvent, des sanctions de Dieu, mais autant d’appels à revenir au Seigneur ou à demeurer davantage dans son intimité. Paul n’écrit pas autre chose aux Corinthiens lorsqu’il affirme au sujet des comportements des juifs durant l’Exode : « Ce qui leur est arrivé devait servir d’exemple et l’Écriture l’a raconté pour nous avertir ».

Cela demeure vrai pour chacun d’entre nous aujourd’hui. Le temps du Carême est ce moment favorable pour ouvrir notre cœur à celui qui veut nous donner la grâce de la conversion ; c’est-à-dire la force de changer dans nos vies personnelles et communautaires ce qui blesse, ce qui tue, ce qui empoisonne notre relation au Dieu sauveur et à nos frères en humanité. Dans ce but nous devons toujours commencer par reconnaître nos complicités avec le mal et accueillir la grâce de la miséricorde divine, du pardon divin. Évidemment, le sacrement de la réconciliation et de la pénitence est sans nul doute un moyen privilégié pour progresser sur ce chemin de la conversion, un chemin qui dure tout au long de notre vie. Nous allons de conversion en conversion durant toute notre existence sur terre, ainsi, librement, nous pouvons collaborer librement à l’œuvre de la grâce qui permettra que nous portions du fruit, comme l’arbre de la parabole. Alors nous mènerons une vie nouvelle et notre Église pourra être une « maison sûre », selon l’expression du Pape François.

Aujourd’hui prions pour les victimes d’abus blessées cruellement et à vie dans leur chair, dans leur cœur et dans leur intelligence. Notre compassion tardive doit devenir permanente et nous permettre de poser des actes qui signifient notre demande de pardon et notre réel désir de réparation de blessures criminelles que seule la miséricorde divine peut guérir. Frères et sœurs, nous devons tous en être les agents par notre prière et par notre compassion, exprimée par des actions concrètes.

Amen

† Jean Legrez, o.p.
Archevêque d’Albi

En la cathédrale Sainte-Cécile, Albi – dimanche 20 mars 2022

1ère lecture : Ex 3, 1-8a.10.13-15
Psaume : 102, 1-2, 3-4, 6-7, 8.11
2ème lecture : 1 Co 10, 1-6.10-12
Évangile : Lc 13, 1-9

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