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Homélie de Mgr Legrez pour la Cène du Seigneur

Frères et sœurs,

À travers la liturgie de la Parole, nous venons d’entendre le récit du lavement des pieds – que nous ne pourrons pas réaliser cette année en raison des mesures sanitaires imposées – et nous venions d’écouter saint Paul expliquant aux Corinthiens comment il a reçu et transmis les rites de ce que nous appelons aujourd’hui l’eucharistie, la messe. Lavement des pieds et eucharistie sont intimement liés. Dans les deux cas, vous l’avez sans doute remarqué, le Seigneur invite les disciples à reproduire ces gestes. « Faites cela en mémoire de moi, faites, vous aussi, comme j’ai fait pour vous ». Ce sont deux expressions complémentaires et révélatrices de l’amour de Dieu, d’un Dieu qui se donne dans l’humilité d’un serviteur et sous l’apparence modeste du pain et du vin.

Ces gestes qui réalisent la Nouvelle Alliance, contractée par le Christ avec l’humanité, s’inscrivent dans la continuité de la fête juive de la Pâque. Jusqu’à aujourd’hui nos frères aînés continuent de célébrer l’évènement de la sortie d’Égypte qui est à l’origine de la constitution du peuple d’Israël, au lendemain de sa libération de l’esclavage vécu sous l’autorité des pharaons. Le sacrement de l’eucharistie prend racine dans ces rites anciens. Il a été voulu par le Seigneur pour exprimer la Nouvelle Alliance. Chaque fois que nous célébrons ce sacrement, nous actualisons l’unique sacrifice rédempteur du Christ. Ce sacrifice que Jésus a réalisé une fois pour toute sur la croix pour enlever le péché du monde. Véritablement, comme le concile Vatican II nous l’a rappelé : « C’est de la liturgie, principalement l’Eucharistie comme d’une source, que la grâce découle en nous, qu’on obtient avec le maximum d’efficacité cette sanctification des hommes dans le Christ. C’est cette glorification de Dieu que recherchent comme leur fin toutes les autres œuvres de l’Église ».

Le Christ ressuscité est réellement présent dans le pain et le vin, devenus son corps et son sang par l’action de l’Esprit Saint. Saint Paul VI précisait ainsi : « Les signes sacrés de l’Eucharistie ne sont pas simplement des symboles et figures du Christ, des témoignages de son affection ou de son action à l’égard de ceux qui participent à sa Cène ; ils le contiennent, Lui, le Christ vivant et vrai, ils le désignent comme présent, tel qu’il est vivant dans la gloire éternelle, mais représenté ici dans l’acte de son sacrifice, pour montrer que le sacrement de l’Eucharistie reflète de manière non-sanglante l’immolation sanglante du Christ sur la croix, et qu’il fait participer aux bienfaits de la Rédemption ceux qui dignement se nourrissent du Corps et du Sang du Christ revêtu des signes du pain et du vin. C’est ainsi ; oui, c’est ainsi ! » Plus loin, saint Paul VI ajoute : « Le Christ vivant et caché sous le signe sacramentel qui nous l’offre, est réellement présent. L’Eucharistie est un mystère de foi, lumière très vive, lumière très douce, lumière très certaine pour celui qui croit ». Saint Ambroise de Milan expliquait déjà ceci au IVe siècle : « Tu dis peut-être : c’est mon pain ordinaire. Mais ce pain est du pain avant les paroles sacramentelles ; dès les paroles de consécration, le pain devient la chair du Christ. Établissons-le donc : comment ce qui est du pain peut être le corps du Christ ? Par quels mots se fait donc la consécration et de qui sont ces paroles ? Du Seigneur Jésus. En effet, tout le reste qu’on dit avant est dit par le prêtre : on offre à Dieu des louanges, on prie pour le peuple, pour les rois, pour tous les autres. Dès qu’on en vient à produire le vénérable sacrement, le prêtre ne se sert plus de ses paroles à lui, mais il se sert des paroles mêmes du Christ. C’est donc la parole du Christ qui produit ce sacrement. Quelle est cette parole du Christ ? Celle même par laquelle il a fait toute chose… Si donc il y a dans la parole du Christ une si grande force que ce qui n’était pas a commencé d’être, combien est-elle plus efficace pour que faire des choses qui étaient… soient changées en autre chose… Donc, pour te répondre,  » avant  » la consécration ce n’était pas le corps du Christ, mais  » après  » la consécration je te dis que c’est aussitôt le corps du Christ ».

Frères et sœurs, en ce jour où nous célébrons l’institution de ce grand sacrement de l’eucharistie, en faisant mémoire de la dernière Cène, permettez-moi de nous inviter à nous interroger sur notre relation aujourd’hui à ce sacrement. Nous préparons-nous consciencieusement pour le recevoir ? En particulier avec l’aide du sacrement de la réconciliation et de la pénitence. Le recevons-nous régulièrement de dimanche en dimanche, selon les indications de l’Église depuis ses origines ? Huit jours après la résurrection, les apôtres se retrouvaient déjà, cela n’a pas changé et ne changera pas jusqu’au retour du Christ dans la gloire. Quel temps consacrons-nous à l’adoration du Saint Sacrement pour toujours mieux recevoir le Ressuscité et en même temps grandir dans une meilleure assimilation de ce sacrement ? Approfondissons-nous notre réflexion biblique, catéchétique, théologique pour mener une vie eucharistique ? Il s’agit de cela. En communiant régulièrement, nous sommes fortifiés dans la vie-même du Ressuscité pour pouvoir vivre comme lui dans l’obéissance et l’adoration du Père, dans la louange, l’action de grâce, dans la joie, une joie qui a déjà une saveur d’éternité.

En instituant l’eucharistie, le Christ, dans un même mouvement a institué le sacerdoce ministériel, tout simplement pour actualiser au cours du temps de l’Église l’unique sacrifice salvateur et nourrir le peuple des croyants du pain du Ciel. En ce jour, remercions le Seigneur pour cet admirable sacrement, pour le ministère des diacres, des prêtres, des évêques. Ce soir, devant le Saint Sacrement, laissons monter notre louange, notre action de grâce, et osons demander avec foi des vocations pour le ministère des diacres, des prêtres dans notre diocèse et au-delà, dans l’Église de France et dans le monde entier. Demandons aussi que les fidèles découvrent de plus en plus les bienfaits de la participation à la messe où le Christ nous nourrit de sa Parole, ainsi que de son corps et son sang pour notre joie, pour notre bonheur, pour notre progression sur le chemin de la sainteté.

Amen

† Jean Legrez, o.p.
Archevêque d’Albi