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Homélie pour la fête de l’Épiphanie

Fête de l’Épiphanie ; institutions au lectorat et à l’acolytat de Pierre Aghnatios

Frères et sœurs,

Au jour de la Nativité l’ange avait annoncé aux bergers une Bonne Nouvelle qui sera une grande joie, pour tout le peuple. De manière tout à fait déroutante pour les plus éclairés d’Israël, le Messie tant attendu se fait connaître aux plus marginaux du peuple, les plus méprisés. Au jour de l’Épiphanie, des mages, probablement des astronomes venant de Perse, en observant la nature, en l’occurrence une étoile, parviennent à Jérusalem. Ils sont à la recherche d’un roi envoyé par le créateur de l’univers. Ces hommes, sans nul doute, sont des sages, des chercheurs de sens. Ils cherchent Dieu et pour le connaître ils n’ont que la nature. Or, ils ont observé l’apparition d’une mystérieuse étoile. Israël bénéficiait depuis des siècles de la Révélation à travers les Écritures, le don de la Loi et les Prophètes. Les grands prêtres interrogés par Hérode pourront lui préciser que de Bethléem sortira un chef qui sera berger du peuple d’Israël.

Si le Messie promis vient d’abord pour son peuple, il apparaît aujourd’hui qu’il désire se faire connaître au-delà du peuple élu. A tout homme de bonne volonté, à tous ceux et celles qui s’interrogent sur le sens de leur existence, quelle que soit leur origine, leur race, leur culture, le Messie offre le salut. Aujourd’hui, le Ciel se manifeste à tous les hommes représentés par ces mages qui, comme dit l’évangéliste Matthieu, se réjouirent d’une très grande joie. Dans leur joie ils offrent à l’enfant des présents pleins de signification qui dévoilent son identité réelle. De l’or, à l’époque propriété royale, ce petit enfant vivant dans la plus grande simplicité est donc roi, il sera le roi de l’univers. De l’encens qui, en Israël, est un parfum réservé à Dieu seul, car cet enfant est bien le Fils de Dieu. Enfin, de la myrrhe qui rappelle que cet enfant qui est Dieu est mortel comme tout homme. Par sa mort il sauvera l’humanité entière, l’emportant dans la gloire de sa résurrection.

à Réalmont : Adoration des mages (1580)

Cette manifestation aux mages n’est que le premier volet de la fête de l’Épiphanie, de la manifestation du Seigneur. Elle en comporte deux autres : le baptême de Jésus et le miracle de Cana. Une voix lors du baptême de Jésus dira : « Celui-ci est mon Fils bien aimé en qui je trouve ma joie ». Ainsi, mystérieusement, celui qui reçoit ce baptême d’eau dont il n’a aucun besoin, ce baptême qui n’était que le signe d’une entrée dans une vie de pénitence, le signe d’une conversion qu’un juif pieux désirait opérer, est déjà mystérieusement annoncé comme le Fils bien aimé du Père. Il y a là une manifestation trinitaire avec la colombe qui se trouve au-dessus de la tête du Christ. Puis, à Cana, comme l’apôtre Jean nous le rapporte, ce sera le commencement des signes, le commencement des miracles que seul un homme qui est aussi Dieu peut accomplir. Là, nous dit l’apôtre, il manifesta sa gloire, il manifesta sa nature divine. Les antiennes de la liturgie de la fête de ce jour rappellent sans cesse ces trois évènements inséparables qui nous font connaître la personne et la mission du Sauveur.

Revenons aux mages, ils se prosternent devant l’enfant. Il faut savoir qu’en Israël on ne se prosternait qu’au Temple, devant Dieu. Les païens se prosternaient devant leurs rois, en Israël la prosternation est réservée au Seigneur. Avec humilité, ces hommes venus de loin posent des gestes qui manifestent leur respect pour ce petit enfant bientôt reconnu comme le Verbe fait chair, le Fils de Dieu, le Messie d’Israël, le Sauveur de tous les hommes.

Frères et sœur, puissions-nous souvent et pourquoi pas quotidiennement, suivre les mages, nous qui savons bénéficier du salut, pour poser des actes d’adoration comme ils surent le faire. Je vous invite à prendre le temps de l’adoration. Lorsque nous adorons le Seigneur, il nous transforme. Laissons-nous transformer par celui qui, dans la puissance de l’Esprit, fait de nos cœurs de pierre des cœurs de chair, capables de battre au rythme de son amour, l’amour divin. Lui seul peut nous apprendre à aimer comme il aime et à donner notre vie comme il a donné la sienne. Nous sommes tous faits pour nous donner quelle que soit notre vocation. C’est dans le don de nous-mêmes que nous nous réalisons et que nous pouvons connaître quelque chose de cette joie que les bergers les mages ont connue devant le Sauveur.

Pierre, je trouve que c’est un petit clin d’œil du Ciel que nous puissions célébrer ces deux institutions, pour un oriental qui vient du Liban, en cette grande fête qui, en Orient, est célébrée avec beaucoup plus de faste que nous le faisons chez nous les latins. Dans les différents rites orientaux, la grande fête autour de la naissance du Seigneur est l’Épiphanie. Ces institutions sont une étape importante dans votre cheminement vers le diaconat permanent. Comme cela a déjà été dit au moment de l’institution au lectorat, vous êtes invité désormais, non seulement à annoncer la Parole mais à en être saisi, à la ruminer de telle sorte que vous puissiez la faire connaître et qu’elle vous façonne toujours davantage. Par l’acolytat vous serez amené à être au service des ministres de l’autel pour aider tout le peuple de Dieu à vivre son sacerdoce. Le sacerdoce des fidèles consiste justement à donner sa vie à Dieu. Ce n’est pas réservé à l’évêque ou aux carmélites. Tout baptisé, au cours de chaque eucharistie, est invité, en s’unissant à la prière eucharistique, à offrir sa vie, à donner sa vie à Dieu, à imiter le Fils premier né dans l’offrande qu’il a faite de lui-même dans sa passion et sur la croix.

Je vous invite, frères et sœurs, à prier en ce jour les uns pour les autres afin que nous soyons capables de vivre ce sacerdoce des fidèles, ce sacerdoce de tout baptisé en offrant notre vie à Dieu et à nos frères. Prions en cette fête pour tous les chercheurs de Dieu de par le monde. Tous ces hommes, toutes ces femmes qui ne connaissent pas encore le Seigneur et qui pourtant cherchent, souvent de façon maladroite, à connaître un sauveur. Prions aussi, de manière insistante, pour tous ceux qui servent leurs frères avec dévouement. Je pense particulièrement, en cette période difficile que nous traversons avec la pandémie à tous ceux qui sont au service des malades d’une manière ou d’une autre, à tous ceux qui travaillent dans nos hôpitaux, dans nos maisons de retraite, à tous ceux qui, véritablement, donnent leur vie pour leurs frères. Prions aussi pour tous les ministres de Dieu, tous ceux et toutes celles qui donnent leur vie pour la croissance du salut. Portons toutes ces personnes dans notre prière aujourd’hui et rendons grâce au Seigneur qui, à travers cette fête apporte la joie à toute l’humanité.

Amen

† Jean Legrez, o.p.
Archevêque d’Albi