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Homélie pour la messe d’ouverture du pèlerinage à Lourdes

Frères et Sœurs, vous l’avez entendu : Jésus dort.

Jésus dort alors que la tempête gronde. Cette histoire peut nous paraître une histoire uniquement du passé. Pourtant, aujourd’hui, la tempête gronde tout autour de nous : tempête du monde, tant les guerres, les violences, qui à travers le monde martyrisent bien des personnes. Tempête du monde, tant sévissent ici ou là de nombreuses injustices. Tempête des épreuves : épreuve du chômage, épreuve des séparations, épreuve de la maladie, épreuve des deuils, épreuve du péché, du manque d’amour, et par-dessus le marché, épreuve des scandales dans l’Église… et Jésus dort ?

Nous sommes démunis. Souvent, nous sommes attristés, nous sommes angoissés. Avec les disciples, nous disons : « Cela ne te fait rien ? » Il semble même que la barque, l’Église dont Jésus est la tête, prend l’eau. Et Jésus dort-il encore ? Comme les disciples, nous nous croyons perdus à certaines heures. Mais la Parole du Christ demeure tout à fait d’actualité : « Pourquoi êtes-vous si craintifs, n’avez-vous pas encore la foi ? »

Face à la puissance du Christ qui apaise la mer déchaînée, c’est-à-dire qui domine les forces du mal, pourquoi nous inquiéter et avoir peur ? N’a-t-il pas vaincu la mort elle-même ? Depuis vingt siècles, Jésus n’a-t-il pas montré sa présence d’une manière toute particulière et quotidienne, à travers les sacrements et dans la vie de ses amis fidèles, les saints ? Alors, pourquoi être craintifs ? « N’avez-vous pas encore la foi ? » demande Jésus. N’est-ce pas la bonne question que chacun peut entendre en ce premier jour de pèlerinage ? Il nous faut y répondre de manière personnelle.

Il est vrai qu’autour de nous, le nombre des croyants semble fondre comme neige au soleil. Notre désappointement face à la difficulté de transmettre la foi à nos propres familles ne serait-elle pas légitime ? Comment ne pourrait-il pas en être autrement ? Une véritable tiédeur semble être le lot d’un grand nombre de baptisés aujourd’hui. Des scandales de toutes sortes n’aident certainement pas les plus fragiles à attendre quoi que ce soit de ce Seigneur des catholiques, et encore moins de certains de ses disciples aux comportements si peu conformes à l’Évangile. Frères et Sœurs, nous sommes déconcertés, nous sommes inquiets, nous sommes pauvres face à l’avenir et face à un présent qui ressemble, certains jours, à un véritable champ de mines.

La parole de Paul aux Romains nous rappelle que Dieu n’a pas épargné son propre Fils, qu’il l’a livré pour nous tous. Face à un tel amour, comment notre cœur peut-il encore rester fermé et indifférent ? Le Tout-Puissant, le Créateur de l’univers, a voulu devenir pauvre, en la personne de son Fils Jésus, pour nous rejoindre et nous faire découvrir son amour miséricordieux. Il est vrai que nous sommes pauvres, et parfois même nous faisons l’expérience de notre misère ; mais il est aussi vrai que Dieu est celui qui nous rend justes. Il s’est fait pauvre pour nous enrichir par sa pauvreté. Il s’est fait pauvre en partageant notre condition humaine. Il a voulu tout partager de notre condition humaine, y compris la mort, pour nous enrichir de sa vie divine, nous partager la condition filiale, nous faire découvrir comme au premier jour, au jour de la Création, que nous sommes ses enfants bien-aimés, créés à son image. Il veut, encore aujourd’hui, que chacun de nous découvre qu’il est un enfant bien-aimé de ce Père. Voilà une bonne nouvelle dans nos détresses ! Pour cela, il a été jusqu’à la mort, et la mort sur la Croix, pour nous montrer son amour et jusqu’à la Résurrection au matin de Pâques. Alors, nous pouvons dire avec Paul : « Rien ne pourra nous séparer de l’amour du Christ, de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus, notre Seigneur ».

Que l’Immaculée, au cours de ces jours de pèlerinage à Lourdes, nous obtienne une confiance renouvelée dans son Fils, quelles que soient nos pauvretés.

Madeleine Delbrêl, une sainte femme du XXe siècle (elle n’est pas encore canonisée, mais elle sera sans doute bientôt bienheureuse) a écrit ceci : « Être pauvre, ce n’est pas intéressant, tous les pauvres sont bien de cet avis. On les comprend, personne n’aime être pauvre. Ce qui est intéressant, c’est de posséder le Royaume des cieux. Mais seuls les pauvres le possèdent ». Alors, si nous parvenons à nous reconnaître pauvres, ayons confiance ; reconnaissons notre pauvreté en sachant que Jésus veille sur chacun de ses frères qu’il est venu sauver, c’est-à-dire : combler de son amour.

Dans quelques instants nous allons le recevoir. Dans chaque eucharistie, il se donne à nous, pour que nous puissions nous donner dans un même élan d’amour, à lui qui nous sauve et qui nous fortifie, qui nous dynamise, qui nous donne la capacité de vivre en enfants bien-aimés du Père, plein de reconnaissance pour le salut apporté aux pauvres. Telle est la Bonne Nouvelle !

Amen.

Jean Legrez, op.
Archevêque d’Albi

De la terre des quatre coins du diocèse d'Albi a été apportée et a permis de constituer une boue. Mais le Seigneur, par sa miséricorde, nous lave de cette boue et restaure notre dignité d'enfants bien-aimés du Père
2019 08 Lourdes web 0017