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Albi : collégiale Saint-Salvy

Le chapitre et l’église

  Albi St Salvy 1La sépulture primitive de saint Salvy est-elle à situer là où est bâtie l’église actuelle ? Rien de moins sûr. Mais quand, en 943, cette terre fut donnée aux moines à condition d’y élever une église en l’honneur de saint Salvy, les reliques du saint y furent transférées et il existe encore sous le maître-autel une crypte resserrée, vestige de constructions très anciennes.

Les moines mérovingiens sont devenus, entre temps, des chanoines réguliers qui mènent la « vie canoniale » selon la règle de saint Chrodegand.

Ce sont des clercs séculiers voués au ministère pastoral, regroupés autour d’un supérieur, abbé ou prévôt, formant un chapitre, assurant l’office divin dans leur église appelée « collégiale ». Le chapitre s’est peu à peu constitué prébendes [1] et revenus de sorte que la construction d’une vaste église a pu être envisagée.

Un premier édifice pré-roman n’a pas laissé beaucoup de traces.
À l’aube du XIIe siècle fut entreprise la belle construction romane qui a donné forme à l’église actuelle. Les malheurs des temps empêchèrent sans doute l’achèvement rapide du projet ; aussi l’œuvre dut être reprise au milieu du XIIIe siècle et poursuivie dans le style gothique de l’époque. Enfin Louis d’Amboise à la fin du XVe siècle mit un point final à l’architecture, en style flamboyant (chœur et premières travées). Les siècles suivants apportèrent ornements intérieurs, statues, orgue, fonts baptismaux, etc.

Si l’unité dans la variété est expression de la beauté, belle est la collégiale Saint-Salvy, car en elle se fondent non seulement la diversité des éléments mais encore celle des styles.

M. le chanoine de Lacger, l’historien de Saint-Salvy l’a fort bien dit : « Dans le seul gros œuvre un œil exercé distingue ici, juxtaposées, enchevêtrées, les formes architecturales d’au moins cinq siècles. Commencée avant les capétiens, l’église ne s’achève guère avant les Valois-Angoulême. Elle est une synthèse des styles carolingien, roman, ogival et flamboyant. Les disparates se fondent, à l’intérieur surtout, dans une si heureuse harmonie que la multiplicité des formes, pâture de choix pour la curiosité intellectuelle, ne nuit pas notablement à l’esthétique générale. » L. de Lacger L’abbaye de Saint-Salvy, p. 48.

Aspect extérieur de l’édifice

L’église Saint-Salvy est malheureusement prise dans d’autres constructions qui ne permettent pas d’en embrasser d’un coup d’œil la structure et l’harmonie : la façade principale est obstruée par de hautes bâtisses et ailleurs des maisons se sont accolées aux murs comme pour y chercher protection.

  Albi St Salvy 2Quand on arrive par la rue Mariès, en venant de la cathédrale, ce qui apparaît d’abord, c’est la tour-clocher appelée tour Lavit, fière et singulière dans sa variété de style et d’appareil.

Les fondations et peut-être le plan sont carolingiens. L’architecture de base est d’un roman plus archaïque que l’église : donjon bâti sur quatre gros piliers rectangulaires, réunis par des arcs à deux rouleaux, bel appareil de pierres blanches, meurtrières étroites. Le XIIe siècle ajouta à la tour primitive sa grâce gothique faite de fines colonnettes avec chapiteaux et corniche à modillons. Le XVe siècle couronna le tout d’un étage en brique, coiffé sur le côté d’une étrange tourelle crénelée, popularisée sous le nom de gacholle.

La ville qui utilisa cette échauguette comme tour de guet y apposa ses armoiries gravées sur une pierre blanche ; mais le chapitre pour manifester ses droits de propriété y plaça aussi son blason à l’effigie de saint Salvy inscrit sur une pierre non moins visible.

L’entrée principale où l’on accède par de larges escaliers, est maintenant sur la façade nord. Le portail de style roman fut malheureusement presque entièrement masqué par un encadrement à l’antique avec fronton et niche. II reste deux des trois voussures, le bandeau d’archivolte et les chapiteaux apparentés à ceux de Vézelay.

On peut pénétrer aussi dans Saint-Salvy par des escaliers qui montent de la rue Sainte-Cécile et de la rue Peyrolière. Et la surprise est grande de déboucher sur un enclos ouvert uniquement sur le ciel, et qui conserve les restes d’un vieux cloître.

Ce cloître est l’œuvre de Vidal de Malvési qui commença son travail en 1270 et le finit dix-huit mois plus tard. La Révolution ne laissa hélas subsister que la galerie orientale et le mausolée de l’artiste. On admirera les fines colonnettes, les chapiteaux, mélange de roman et de gothique, les uns à feuillage, d’autres à figure et même historiés : tel celui où l’on voit le démon traîner hommes et femmes enchaînés vers la marmite de l’enfer.

En reconnaissance du bon travail accompli, Malvési fut autorisé à construire un tombeau pour lui et pour son frère contre l’église. Le style en est purement gothique. Les deux statues qui entourent en haut la Vierge à l’enfant seraient celles des frères Malvési.

Albi St Salvy 3Cette face nord de l’église, bien visible du cloître, permet de distinguer dans la construction les diverses assises, romane en bel appareil, gothique en appareil plus grossier puis en brique, et une tour symétrique de la tour Lavit et de facture semblable, qui faisait partie de l’ancien monastère.

Albi St Salvy 4

Ce jardin fermé, la haute quenouille de quelques cyprès, la margelle d’un puits, ce cloître intemporel, les murs patinés par le soleil évoquent les vieux moûtiers [2], invitent au recueillement et accordent l’âme à la mystérieuse présence de Dieu.

L’intérieur

Quand on pénètre à l’intérieur, on est tout de suite saisi par une impression de lumière, d’élan, de légèreté. Le bel alignement et l’enlèvement des colonnes ouvrent une perspective d ‘infini, endiguent l’imagination et concentrent la pensée sur l’essentiel.

Le plan est celui d’une basilique en forme de croix latine : nef à sept travées avec des collatéraux de largeur deux fois moindre ; la croisée du transept déborde à peine sur l’alignement des murs. Détail curieux : les absidioles sont placées hors de la perspective des bas-côtés.

Les quatre premières travées en partant du fond ont conservé de larges traces de l’art roman : les piliers dans toute leur élévation, massifs, armés sur les quatre faces de colonnes engagées, chapiteaux à feuillage, à figure ou historiés, ouvertures en plein cintre.

Les absidioles sont les seules parties de l’œuvre romane dont la structure n’ait pas subi de changement : voûte en cul de sac dont l’arc d’ouverture est légèrement outrepassé. Les retables ont été placés beaucoup plus tard.

Le chœur, reconstruit au XVe siècle avec les deux travées qui le précèdent est flamboyant. Le maître-autel et le baldaquin sont de 1723. Au-dessous de l’autel, les restes de la crypte où dans des amphores de céramique très anciennes sont gardées les cendres de saint Salvy.

Statues et tableaux

Saint-Salvy possédait de très belles châsses et reliquaires confisqués par la Révolution.

Une statue de bois polychrome, présumée du XIIe siècle, est la seule représentation du saint que nous ayons. Elle a été retrouvée assez récemment dans un galetas et est conservée à la sacristie : elle nous livre une image du saint conforme à la tradition : un beau visage mystique au regard tourné vers l’intérieur.

Albi St Salvy 5On admirera encore dans la sacristie une Pietà de la fin du XVe siècle en calcaire polychrome. Au fond de l’église, sous les orgues, six statues polychromes, de facture robuste, qui semblent une copie de celles de la cathédrale, représentent les personnages du sanhédrin. Ils entouraient autrefois un « Ecce homo » situé dans la première chapelle à droite en partant du fond.

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Dans cette même chapelle, à gauche est accrochée une descente de croix, peinture sur bois qui fait songer à un primitif flamand d’une grande fraîcheur.

On pourra aussi apprécier des toiles plus récentes ou des statues des XVIIe et XVIIIe siècles, celle de saint Roch, le Christ en croix avec la Vierge et saint Jean.

Dans la chapelle de la sainte Vierge, partie la plus ancienne de l’église, on s’arrêtera devant les statues de Judith et d’Esther, copies réussies des célèbres œuvres de la cathédrale Sainte-Cécile.

Conclusion

Nous l’emprunterons à l’historien de Saint-Salvy, le chanoine L. de Lacger : « Saint-Salvy est une anthologie des styles médiévaux d’architecture. D’un seul coup d’œil, un regard averti reconnaît trois types de contrefort, trois formes de fenêtre, trois espèces d’appareil correspondant chacun à des âges différents. Bien que, du point de vue esthétique, l’œuvre soit de second ordre, elle est susceptible d’être classée au tout premier si l’on a égard à son intérêt synthétique et, archéologiquement parlant, à sa valeur pédagogique. »
Texte extrait de la plaquette Église-collégiale Saint-Salvy Albi écrite par le Chanoine L. Chamayou

Retables

Retable de la chapelle de la Vierge, dans l’absidiole sud. En bois sculpté, doré et peint, il épouse la forme des murs.
Quatre colonnes en marbre à chapiteaux corinthiens supportent un entablement.
En couronnement, fronton cintré orné du triangle rayonnant
Au centre du retable, statue de la Vierge à l’Enfant dans une niche.
Décors de guirlandes
Première moitié du XVIIIe siécle – Cl. MH 1975

Retable de l’absidiole Nord en bois sculpté, peint et doré et marbre, de composition identique à celui de l’absidiole sud.
Au centre, toile représentant le baptême du Christ. Dans le tympan apparaît le Père Éternel.
Vers 1720 – Cl. MH 1975

Retable de la dernière chapelle nord en bois sculpté peint et doré et marbre.
Un compartiment délimité par deux colonnes en marbre à chapiteaux corinthiens.
Au centre, niche avec statue de saint Laurent qui tient un gril.
Couronnement : entablements et fronton avec deux petites volutes en appui, tympan orné de la colombe entourée de nuées.
Belles guirlandes autour de la niche, deux angelots décorent le cul-de-lampe de la niche.
Daté 1737 – Cl. MH 1975

Dans À la découverte des retables tarnais par Sylvie Soukovatoff sous la direction de Jean le Pottier – Archives et patrimoine 1992

L’orgue

En 1732, Christophe Moucherel installe un orgue à Saint-Salvi à partir d’un instrument du XVIIIe siècle. Il agrandit le buffet dans sa largeur. Les tuyaux existants sont alors réutilisés en partie. L’orgue compte alors trois claviers et vingt-cinq jeux.
Au XIXe siècle, l’orgue est remanié dans l’esthétique romantique et demeure ainsi jusqu’aux années 1920.
En 1929, le chanoine Vayssière, prêtre à Saint-Salvi et organiste décide de reconstruire l’orgue selon les critères de l’époque : jeux de fonds denses et profonds, ajouts de mutations, mise en place d’une transmission pneumatique. Le positif dos est vidé, tous ses tuyaux sont mis dans le grand buffet. Avec 37 jeux réels, on en obtient 60 à la console (dédoublement). Ces travaux sont confiés à Puget.
En 1920-1930 l’orgue est inauguré par Adolphe Marty et Marcel Dupré.
L’instrument n’a plus subi aucune modification depuis.
Cet orgue néo-classique retient toute l’attention de nombreux organistes qui le considèrent comme idéal pour aborder tout le répertoire du XXe siècle à nos jours.
Bien que toujours en état de marche il nécessite de subir d’importants travaux de remise en état.

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[1] revenu attaché à certains titres ecclésiastiques

[2] ce mot désignait les monastères. Il est encore utilisé dans certains noms de lieux