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Pour (re)découvrir la séquence dans la liturgie

La séquence (en latin sequentia du verbe sequire, suivre) est « ce qui suit l’alléluia » car, avant le Concile Vatican II, elle était placée entre l’Alléluia et l’Évangile. Depuis, les séquences sont chantées après la deuxième lecture pour préserver le lien entre l’Alléluia et l’Évangile. Entonnées une fois par an, les versions latines sont difficilement mémorisables par l’assemblée.

Le texte de la séquence était à l’origine une prose au rythme libre à laquelle on a ajouté peu à peu d’autres textes. Deux choeursinterprétaient les strophes en alternance.

Un autre type de séquences au rythme régulier avec des vers égaux et des rimes est apparu au XIe siècle. Au siècle suivant, les séquences se sont multipliées pour chaque dimanche et fête : le XIIe siècle est un âge d’or avec notamment les compositions d’Adam, de l’abbaye Saint-Victor à Paris.

Au XVIe siècle, le concile de Trente a supprimé toutes les séquences sauf quatre : celle de Pâques, celle de Pentecôte, celle de la fête du Saint-Sacrement et celle de la Messe pour les défunts. Les trois premières sont toujours lues ou chantées de nos jours.

En 1727, le Stabat Mater a été réintégré au Missel romain lorsque la fête de Notre-Dame des Sept-Douleurs s’est étendue à l’Église universelle.

 

La séquence de Pâques : Victimae Pascali laudes

La première séquence (et la plus ancienne) est le Victimae Pascali laudes. C’est la séquence de Pâques, obligatoire pour le Jour de Pâques. Elle est attribuée à Wipo, moine bourguignon mort en 1050, chapelain à la cour de l’empereur Conrad II. Les deux premières strophes disent la joie de la victoire du Christ sur la mort. Apparaît alors un dialogue entre Marie-Madeleine et les apôtres. La conclusion redonne la parole aux apôtres avec l’enthousiasme de la première strophe. Et le poème s’achève sur une imploration vigoureuse au Christ ressuscité.

Texte latin et mélodie sont si étroitement liés qu’aucune version en français n’a vraiment fait l’unanimité.

Version harmonisée en 1920 par le chanoine Jehan Revert, maître de chapelle de Notre-Dame de Paris. Elle fait alterner le chœur et le grand orgue. Elle est ici interprétée par l’ensemble vocal Jubilate Deo dirigé par Laurent Vauclin. Jorris Sauquet est aux claviers du grand orgue historique de St-Gervais (Paris 4e) où furent organistes les Couperin aux 17e et 18e siècles.  L’écriture chorale met bien en valeur la structure du texte, notamment le dialogue central entre Marie-Madeleine et les apôtres.

 

Une grande prière à l’Esprit Saint : Veni Sancte Spiritus

Dans l’année liturgique, la séquence suivante est le Veni Sancte Spiritus, obligatoire pour la Pentecôte. Le texte de cette séquence a été écrit autour de 1220 par Etienne Langton, archevêque de Cantorbéry qui a le plus contribué à promouvoir le culte de saint Thomas Becket. C’est une grande prière à l’Esprit Saint, pour lui demander de venir en nous, en déployant les dons attendus : elle fait écho à la lecture des Actes des apôtres, qui raconte l’événement de la Pentecôte. La séquence actualise le récit biblique pour que ce qui a été vécu à Jérusalem 50 jours après la résurrection du Christ le soit aussi par nous aujourd’hui. Nous ne sommes pas seuls, mais accompagnés par l’Esprit d’amour et de vérité qui donnera à chacun ce qu’il lui faut pour avancer et se relever à condition de le demander.

Les attributs de l’Esprit Saint sont évoqués avec de nombreux verbes d’action dans cette séquence divisée en dix courtes strophes de trois vers. La forme poétique, très soignée, utilise des systèmes de rimes et d’échos.

Plusieurs adaptations françaises, en général sur des musiques nouvelles, ont été écrites.

Version grégorienne  par les frères dominicains Stefan Ansinger et Alexandre Frezzato.

 

Version mise en musique par Markus Wittal pour la communauté de l’Emmanuel. Le texte est celui du Lectionnaire avec un refrain qui facilite la participation de l’assemblée.

 

Pour la Fête-Dieu, la séquence Lauda Sion Salvatorem

Deux semaines après la Pentecôte, nous sommes invités, pour ce que l’on appelait jadis en France la Fête-Dieu, à chanter la séquence Lauda Sion Salvatorem. Elle a été écrite, à l’occasion de l’institution de cette nouvelle fête en 1264 par le grand théologien saint Thomas d’Aquin. Il a eu l’idée d’utiliser une musique existante, celle d’une séquence pour la Fête de la Sainte Croix (14 septembre)  Lauda crucem.

Vingt-quatre strophes évoquent le mystère eucharistique et la présence réelle ; les dernières s’adressent au Christ. Musicalement, les strophes sont regroupées par 2. Les quatre dernières (21 à 24) sont les plus usitées : Ecce panis…

Version grégorienne interprétée par les moines bénédictins de l’abbaye Saint-Maurice-et-Saint-Maur de Clervaux, au Luxembourg.

 

Le voici le Pain des anges : version mise en musique par Grégory Notebaert (né en 1975) pour les Ancolies 2015 à Lourdes. Les deux premières strophes contemplent Jésus « pain eucharistique », préfiguré dans l’Ancienne Alliance notamment par la manne, le sacrifice d’Isaac, et l’agneau immolé. Elles sont traitées avec une même mélodie à l’unisson. Les deux strophes suivantes se font prière au Christ Bon Pasteur qui nous conduit à sa table céleste et éternelle.

 

Version mise en musique par Philippe Robert (né en 1955), interprété par le Jeune Chœur Liturgique

 

Stabat Mater : séquence pour la fête de Notre-Dame des Douleurs

La quatrième séquence n’est entrée dans la liturgie romaine qu’en 1727. Elle date cependant du XIIIe siècle et a été attribuée au poète Jacopone da Todi (mort en 1306). Il s’agit du Stabat Mater pour la fête de Notre-Dame des Douleurs, le 15 septembre.

Le texte sans musique, très marqué par la spiritualité franciscaine de l’époque, est composé de vingt strophes de trois vers.

Après avoir campé la scène de la croix, où le spectacle de son Fils agonisant transperce l’âme de la mère, le poète se demande si l’on peut rester insensible à une telle douleur. Revenant à Marie, il décrit de nouveau ce qu’elle a sous les yeux. Alors il se met en cause, désire partager ses pleurs, recevoir les stigmates des plaies du crucifié et rester en compassion tout au long de sa vie. Il lui faudra pour cela participer à la souffrance du Christ et s’enivrer de son sang. La pensée de son propre salut prend enfin le poète, et les dernières strophes sont une supplication pour être admis, grâce à la Vierge, en paradis.

Ce texte a inspiré de nombreux compositeurs à travers les siècles.

Stabat Mater grégorien

 

Giovanni Battista Pergolèse (1710-1736)

 

Stabat Mater (RV 621) d’Antonio Vivaldi (1678-1741) a été composé en 1712 pour ensemble et voix. Il comporte 9 mouvements dont seuls les trois premiers sont illustrés dans cet enregistrement :

1) Stabat Mater dolorosa – Largo

2) Cuius animam gementem – Adagissimo

3) O quam tristis et afflicta – Andante

 

Stabat Mater de Joseph Haydn (1732-1809)

 

Dies irae

L’autre poème datant du XIIIe siècle, marqué lui aussi par la spiritualité franciscaine, et souvent attribué au franciscain Thomas de Celano, est le Dies irae. Il faisait partie de la Messe pour les défunts depuis la fin du XIIe siècle. Vatican II l’a relégué dans la Liturgie des Heures. Le texte qui insiste sur le jugement et la colère plus que sur la Résurrection a inspiré nombre de Requiem classiques et romantiques mais n’est déjà plus dans ceux de Fauré ou de Duruflé.

Le texte est divisé en trois parties, suivies d’une coda. Chaque partie comporte trois mélodies répétées deux fois. Ce n’est qu’à la troisième fois que le cycle est interrompu par la strophe du Lacrimosa, totalement nouvelle.

L’ambiance générale est celle du Jugement Dernier, tel qu’il est présenté en Matthieu, chapitre 25 : la résurrection des morts, le Christ en Juge, les nations devant lui, et la division des hommes en brebis sauvées et les chèvres condamnées.

Version grégorienne chantée par le chœur des Moniales de l’Abbaye Notre-Dame d’Argentan dans l’Orne puis par les moines de Solesmes et enfin par ceux de l’abbaye de Notre Dame de Fontgombault dans l’Indre.

 

Dies irae de Jean-Baptiste Lully (1632-1682), par le chœur de chambre de Namur

 

Extrait du Requiem de Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791), par le chœur de l’orchestre de Paris et l’orchestre Prométhée

 

Extrait du Requiem de Giuseppe Verdi (1813-1901), par le chœur et l’orchestre du théâtre de la Scala à Milan (Italie)

 

Dans une version contemporaine d’Alexis Duffaure (né en 1982)

 

Catherine Barthe,
Chef de chœur
et responsable de la commission diocésaine de musique liturgique