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« J’ai vu l’eau vive » : une hymne baptismale à redécouvrir

Avec la fête de Pâques, c’est le grand retour du rite de l’aspersion et de l’hymne qui l’accompagne souvent : « J’ai vu l’eau vive », adaptation française du Vidi aquam grégorien. Célébrée dans la nuit de Pâques, juste après les rites des baptêmes, et en lieu et place du rite pénitentiel tous les dimanches de Pâques, l’aspersion vient signifier le renouvellement dans le cœur des fidèles de la grâce baptismale, acquise par la traversée de la mort par le Christ et la victoire de sa résurrection. C’est ce que chantent les paroles de cette hymne baptismale :

  1. J’ai vu l’eau vive
    jaillissant du cœur du Christ, alléluia !
    Tous ceux que lave cette eau
    seront sauvés et chanteront : alléluia !

 

  1. J’ai vu la source
    devenir un fleuve immense, alléluia !
    Les fils de Dieu rassemblés
    chantaient leur joie d’être sauvés, alléluia !
  1. J’ai vu le Temple
    désormais s’ouvrir à tous, alléluia !
    Le Christ revient victorieux,
    montrant la plaie de son côté, alléluia !

 

  1. J’ai vu le Verbe
    nous donner la paix de Dieu, alléluia !
    Tous ceux qui croient en son nom
    seront sauvés et chanteront : alléluia !

Au pied de la Croix

Le premier couplet nous renvoie au pied de la Croix, à la vision de saint Jean : « Quand ils arrivèrent à Jésus, voyant qu’il était déjà mort, ils ne lui brisèrent pas les jambes, mais un des soldats avec sa lance lui perça le côté ; et aussitôt, il en sortit du sang et de l’eau » (Jn 19, 33-34). Les Pères de l’Église y ont très vite vu la naissance des sacrements, en particulier du baptême et de l’eucharistie – puisque saint Jean, dans son évangile, n’évoque pas l’institution de l’eucharistie au soir du jeudi saint –. L’eau « vive » rappelle encore la promesse de Jésus à la Samaritaine : « Si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : “Donne-moi à boire”, c’est toi qui lui aurais demandé, et il t’aurait donné de l’eau vive » (Jn 4, 10).

Nous pouvons encore y lire la préfiguration de ce qui nous attend dans le Royaume de Dieu, comme le présente la vision finale de l’Apocalypse : « Moi, je suis l’alpha et l’oméga, le commencement et la fin. À celui qui a soif, moi, je donnerai l’eau de la source de vie, gratuitement. Tel sera l’héritage du vainqueur ; je serai son Dieu, et lui sera mon fils » (Ap 21, 6-7). La réalité de notre adoption divine, la filiation que nous procure le baptême, nous fait déjà entrer dans la condition naturelle et éternelle de notre humanité recréée et sauvée, qui chantera à « voix forte », avec la « foule immense dans le ciel, qui [proclame] : “Alléluia ! Le salut, la gloire, la puissance à notre Dieu. Ils sont vrais, ils sont justes, ses jugements” » (Ap 19, 1-2).

La vision d’Ézékiel

Le deuxième couplet évoque davantage la vision d’Ézékiel, à la fin de son livre : la source jaillie du côté oriental du Temple, qui s’élargit et s’approfondit au fur et à mesure qu’elle s’éloigne du sanctuaire (voir Ez 47). « Cette eau, précise l’ange qui conduit la vision du prophète, assainit tout ce qu’elle pénètre, et la vie apparaît en tout lieu où arrive le torrent » (Ez 47, 9b), y compris « la mer Morte dont elle assainit les eaux » (v. 8c). Elle purifie, guérit et redonne vie de manière durable – et même éternelle ! – à tout ce qui était marqué par la mort et le péché.

Le rassemblement des « fils » dont le Temple était le symbole nous remet, encore une fois, dans la perspective eschatologique de la foule immense de l’Apocalypse chantant avec les Anciens : « Alléluia ! Il règne, le Seigneur notre Dieu, le Souverain de l’univers. Soyons dans la joie, exultons, et rendons gloire à Dieu ! Car elles sont venues, les Noces de l’Agneau, et pour lui son épouse a revêtu sa parure » (Ap 19, 6c-7).

Le Temple est relevé

Le troisième couplet nous fait rester près du Temple, mais cette fois dans ce qu’il s’ouvre à toutes les nations. Est ici évoqué le rideau du sanctuaire qui se déchire à la mort du Christ (voir Mc 15, 38), signifiant que la présence de Dieu se donne non seulement à ceux qui viendront dans un lieu particulier, mais à tous ceux qui, dans l’ouverture de leur cœur, accueilleront cette présence salutaire capable de transformer leur vie. C’est aussi ce que montre Jésus ressuscité, apparaissant au milieu de ses disciples reclus au Cénacle (Jn 20, 19-20), ses plaies visibles mais glorieuses offrant à Thomas la possibilité d’entrer dans un acte de foi véritable : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » (Jn 20, 28).

Accueillir le salut

C’est cette même apparition pascale qui préside au quatrième couplet du chant : le Verbe, Christ ressuscité, se manifeste à des disciples le soir de Pâques – comme huit jours après – en leur adressant le salut traditionnel juif : « Shalom aleichem – La paix soit avec vous » (Jn 20, 19.21.26 ; Lc 24, 36). Mais il ne s’agit pas ici d’un simple salut. En soufflant sur les disciples l’Esprit Saint (voir Jn 20, 22-23), Jésus donne de pouvoir déployer dans toute l’existence du croyant sa puissance, comme l’explicite saint Paul : « voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix… » (Ga 5, 22).

Alors peut s’accomplir une des ultimes paroles de Jésus avant l’Ascension : « Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé » (Mc 16, 16a), en attendant le rassemblement final de toute la Création dans la Jérusalem céleste pour chanter en chœur : « Alléluia ! Louez notre Dieu, vous tous qui le servez, vous tous qui le craignez, les petits et les grands ! » (Ap 19, 5).

Quelques versions :

J’ai vu l’eau vive (AELF/Berthier) I132-1

J’ai vu l’eau vive (AELF/Robert) I18-65-11

Une source d’eau vive (En-Calcat/Robert) I24-01

J’ai vu l’eau vive (AELF/Lécot)

J’ai vu des fleuves d’eau vive (Wittal/Emmanuel) I44-62

J’ai vu l’eau vive (AELF/Lucien Deiss)

Un commentaire proposé par le Père Gaël Raucoules

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