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Messe de rentrée 2018-2019 des étudiants à Toulouse – Homélie

Mercredi 10 octobre, 1500 étudiants étaient réunis à la cathédrale de Toulouse pour la messe de rentrée des étudiants ! Mgr le Gall avec Mgr Fonlupt, Mgr Eychenne, Mgr Legrez y ont rappellé l’importance des jeunes dans l’Eglise.

Homélie de Mgr Jean Legrez

Frères et sœurs,

Nous voici réunis dans cette cathédrale Saint-Étienne en ce début d’année universitaire pour rendre grâce au Seigneur ensemble pour le don de la foi qui fait de chacun de nous des chercheurs de Dieu, plus ou moins avancés dans cette quête qui, pour chacun, s’étend à l’histoire de sa vie.

À Rome, un synode constitué de 267 évêques du monde entier, de 34 jeunes de 18 à 29 ans, de 23 experts et 49 auditeurs, est réuni pour réfléchir sur les jeunes, la foi et le discernement des vocations. Nous sommes en communion profonde avec cette assemblée synodale ; nous prierons au cours de cette eucharistie pour que l’Esprit-Saint montre à chacun des participants les meilleurs moyens d’annoncer l’Évangile aux jeunes et d’aider les jeunes à discerner la volonté du Seigneur sur eux.

Dans le monde, ces dernières semaines, de multiples révélations sur les abus sexuels et toutes les formes d’abus de pouvoir dans l’Église plongent dans la consternation et la tristesse nombre de fidèles. S’il convient d’abord de continuer à tout mettre en œuvre pour aider les victimes et éviter que se reproduisent des actes criminels, nous ne devons pas oublier que la majorité des clercs sont fidèles à leurs engagements et sont donc des personnes fiables, même si certains médias semblent parfois insinuer le contraire.

C’est dans ce contexte plein d’espérance avec le synode romain et si troublant avec ces scandales causés par des ecclésiastiques, que nous pouvons ce soir, avec un des disciples de Jésus, lui demander de nous apprendre à prier comme Jean-Baptiste l’avait enseigné à ses disciples. En saint Luc, Jésus nous répond : « Quand vous priez dites Père », et en saint Matthieu : « Notre Père ». La version de saint Matthieu est celle que la tradition liturgique a retenue. Ces premiers mots de la prière du Seigneur expriment une relation nouvelle et extraordinaire que nous pouvons avoir avec Dieu.

Il nous arrive de réciter de manière un peu machinale cette révélation fabuleuse qui nous introduit dans la prière personnelle de Jésus à son Père et qui, en même temps, exprime notre condition filiale lorsque nous laissons l’Esprit Saint, en nous et avec nous, dire « Abba ! Père ! ».

Nous vivons dans une société qui a tué le père. Beaucoup de nos contemporains sont frustrés en raison d’une paternité humaine malheureusement faible, insignifiante ou absente. Quant à la paternité divine, trois siècles de philosophie soit agnostique soit carrément athée, ont fait le lit de notre culture contemporaine qui voudrait se passer de toute forme de paternité, aussi bien humaine que divine. L’homme soi-disant moderne, éclairé par la science, en supprimant toute forme de paternité, devient le programmateur d’une humanité robotisée, établissant une relation de domination avec ses semblables « moins éclairés que lui », comme avec ses robots, prouesse de son génie…

La prière du Seigneur nous introduit dans un tout autre climat. Chaque fois que nous prononçons avec attention, sous l’influence du Saint Esprit, ces mots : « Notre Père ». Nous retournons alors à l’état des enfants, comme Jésus le demande à chacun de ses disciples pour entrer dans son Royaume. Or, c’est aux « tout petits » que le Père se révèle. Saint Jean Cassien remarque qu’à cet instant : « C’est un regard sur Dieu seul, un grand feu d’amour. L’âme s’y fond et s’abîme en la sainte dilection, et s’entretient avec Dieu comme avec son propre Père, très familièrement, dans une tendresse de piété toute particulière » (S. Jean Cassien, coll. 9, 18). Et saint Augustin affirme : « Notre Père : ce nom suscite en nous, tout à la fois, l’amour, l’affection dans la prière, (…) et aussi l’espérance d’obtenir ce que nous allons demander (…). Que peut-Il en effet refuser à la prière de ses enfants, quand Il leur a déjà préalablement permis d’être ses enfants ? » (S. Augustin, serm. Dom. 2, 4, 16 – cf. CEC n° 2785).

Pouvoir dire : « Notre Père », c’est à chaque fois prendre conscience de la grâce magnifique qui nous a été donnée par le Christ : « Nul ne connaît le Père, si ce n’est le Fils et celui à qui le Fils veut bien le révéler » (Mt 11, 25). Ainsi en priant le Père « nous sommes en communion avec lui et avec son Fils, Jésus Christ …/… Nous le connaissons et le reconnaissons dans un émerveillement toujours nouveau » (CEC 2781). En étant introduits par le Christ dans la mouvance de l’Esprit à connaître Dieu comme « Père », nous l’adorons, nous le remercions de nous avoir révélé son nom et de croire à sa présence. Quel bonheur de se savoir enfant d’un Père qui n’est qu’amour ! Le meilleur des pères sur terre n’est qu’une pâle image du Père éternel dont l’amour miséricordieux n’a aucune frontière et qui s’est manifesté sur le visage du Christ, le Fils de Dieu fait homme, allant jusqu’à donner sa vie sur la croix par amour de chacun de nous.

Nous ne nous contentons pas de dire « Père » mais « Notre Père ». Ainsi, nous nous souvenons que nous partageons la condition filiale de Jésus éternellement engendré par le Père, source et origine de la divinité, d’où procède également l’Esprit-Saint. Ce « notre » nous rappelle aussi que nous partageons pareillement la condition filiale de tout être humain créé par Dieu. Nommer Dieu « notre Père » nous fait sortir de tout individualisme, nous ouvre aux dimensions de l’amour bienveillant du Christ pour tous les hommes, ceux qui le connaissent, comme pour ceux qui ne le connaissent pas encore.

Par le baptême, devenus membres du corps du Christ, nous vivons une communion nouvelle et fraternelle qui invite tous les chrétiens à surpasser les divisions et rechercher l’unité entre enfants d’un même Père, au sein de l’Église comme des sociétés civiles.

Demandons au Seigneur les uns pour les autres l’audace et l’humilité de dire souvent « Notre Père », pour que notre cœur se dilate et qu’embrasés par l’Esprit-Saint, les sentiments du Christ nous habitent et marquent du sceau de son amour chacun de nos actes. Notre vie deviendra une prédication et nos paroles annonceront la Bonne Nouvelle là où Dieu nous place ! Qu’il en soit ainsi ! Amen !

† Jean Legrez, o.p.
Archevêque d’Albi

En la cathédrale Saint-Étienne, mercredi 10 octobre 2018, 20h00 – Messe votive à l’Esprit Saint
1ère lecture : Ga 2, 1-2.7-14
Psaume : Ps 116, 1, 2
Évangile : Lc 11, 1-4

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