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Homélie du jour de Pâques

Frères et sœurs,

En ce jour de Pâque, l’Évangile de Jean nous montre comment une femme a été la première messagère de la résurrection, l’évènement central de toute l’histoire du salut ; à partir de la victoire du Christ ressuscité, le cours du monde est changé. Alors, permettez-moi de souligner que c’est une femme qui, la première, non seulement a compris mais a été la messagère de la résurrection. Cela pourrait éviter une certaine misogynie attribuée parfois à la Sainte Église. Il faut mettre chaque chose à sa place, chacun a son rôle. Il se trouve que le rôle majeur a été donné à une femme. Après Marie, la Mère de Dieu, Marie-Madeleine est « l’apôtre des apôtres ». Tel est son titre depuis les origines de l’Église, l’apôtre des apôtres avant le Pape, avant les évêques. Qu’on s’en souvienne !

Que voit cette pauvre Marie-Madeleine qui est complètement désolée, parce que son Christ, celui qui l’a sortie de son marasme, a été tué sur la croix comme un bandit, le pire des bandits, il a subi le supplice des esclaves, le déshonneur par excellence. Comme c’était la veille du sabbat, lorsqu’il est mort, le soleil était couché on ne pouvait donc plus faire les rites funéraires prévus par les traditions juives. Il avait été simplement mis au tombeau, placé dans un linge replié sur lui-même avec un suaire qui lui entourait le visage et la pierre avait été roulée. Il fallait, dès l’aurore – l’évangéliste nous dit qu’elle part du grand matin, que c’était encore les ténèbres, donc très tôt le matin – il fallait que Marie-Madeleine se rende au tombeau. Là, contre toute attente, la pierre a été roulée. Vous savez sans doute que les tombeaux à l’époque étaient des grottes naturelles ou des grottes creusées dans le roc. Pour clore ces chambres funéraires l’habitude était de rouler une pierre énorme. Il fallait plusieurs hommes pour rouler la pierre. Elle ne savait pas si elle pourrait entrer dans la tombe et, grande surprise, elle trouve la pierre enlevée et là elle découvre un tombeau vide. C’est, pour elle, une vision terrifiante, le corps n’est plus là. Non seulement il a été atrocement supplicié, il a subi une mort honteuse, mais maintenant son corps n’est plus là. Son sang ne fait qu’un tour et elle court immédiatement prévenir les apôtres, eux qui n’étaient guère téméraires ; il faut dire qu’au soir et au lendemain de la crucifixion ils craignaient qu’il puisse leur en arriver autant, ils étaient les disciples du crucifié. Ils s’étaient enfermés dans la crainte et la peur.

Finalement, Pierre, le premier, le chef, et Jean, le disciple bien-aimé, celui qui était le plus jeune du groupe et avait une complicité avec le Seigneur, partent tous les deux. Évidemment le plus jeune court plus vite et il arrive le premier au tombeau. Mais, devant le spectacle qu’il peut contempler, il ne rentre pas. Quel spectacle ? Les linges, nous dit l’évangéliste, sont posés à plat. En fait, l’habitude était de déposer le corps d’un défunt sur une bande de tissu repliée sur lui. Autour du visage, pour maintenir le menton et la bouche fermée, on mettait une mentonnière et un linge posé dessus. Tout est en place, les linges sont à leur place, mais vidés de leur contenu. Essayez, frères et sœurs, d’en faire autant quand vous sortez de votre lit ! Devant ce fait extraordinaire, Jean comprend qu’il s’est passé quelque chose qui n’est pas ordinaire. Il y a eu un miracle. Quelque chose qui dépasse la compréhension humaine. Les linges se sont vidés du corps, comme s’il avait été aspiré sans rien déplacer. Jean, avec les yeux de la foi et avec sa passion, comprend tout à coup ce que Jésus avait laissé entendre. Il avait parlé de son mystérieux retour, mais ressuscité… Ce mot, semble-t-il, Jésus l’avait employé mais les disciples ne comprenaient pas de quoi il s’agissait. Comprenons-nous mieux aujourd’hui ? Certes pas. L’évènement nous dépasse complètement. Jamais un homme supplicié, mort sur une croix n’est revenu à la vie. Nous sommes tous dépassés. Ce qui est sûr, c’est que d’une part le tombeau a été trouvé vide et que de ce vide une lumière extraordinaire a jaillie pour ceux qui, comme Jean, avait déjà fait confiance à Jésus. Et nous, qui ne comprenons pas plus l’évènement aujourd’hui, nous faisons confiance à ceux qui nous l’ont rapporté. Les onze au soir de ce même jour de Pâques, virent Jésus qui leur est apparu en leur souhaitant la paix et en soufflant sur eux en leur disant : « recevez l’Esprit Saint ». L’Esprit que par son sacrifice Jésus a acquis pour tout homme de bonne volonté qui le reconnaît comme Seigneur. Finalement, nous savons que Jésus est apparu aux onze et, d’après Paul dans les Actes de Apôtres, nous savons qu’il est apparu à plus de cinq cents. Vous savez sans doute que les Apôtres sont morts à cause de leur foi dans le Christ Ressuscité et depuis eux, de multiples martyrs qui ont toujours soutenu que « Jésus est ressuscité, il est vivant, il est entré dans la gloire du Père et par son Esprit il est désormais vivant au cœur de chaque fidèle devenu un autre Christ ». Jésus ressuscité nous accompagne toute notre existence et nous attend auprès du Père.

Chers enfants, je ne sais pas si vous avez compris tout ce que j’ai dit, mais je voudrais m’adresser maintenant plus particulièrement à vous. Si vous demandez le baptême, aujourd’hui en ce beau jour de Pâques, c’est parce que vous croyez comme nous que Jésus est vivant. On ne le voit pas et pourtant on peut s’adresser à lui dans la prière et entretenir chaque jour avec lui une relation d’amitié. Vous savez ce qu’est l’amitié, c’est important. Dites-vous une chose, nous n’avons pas, nous tous ici, de plus grand ami que Jésus. Avons-nous un seul ami sur terre qui a donné sa vie pour nous, qui est mort pour nous ? Jésus l’a fait, ainsi que bien des martyrs à sa suite ; et nous avons eu un exemple ces jours-ci avec ce colonel de gendarmerie qui a suivi l’exemple de Jésus, qui a donné sa vie pour quelqu’un d’autre, pour une mère de famille. Donc, vous croyez que Jésus est vivant et qu’il est votre ami. Frères et sœurs, est-ce que vous pensez souvent à cet ami, l’ami par excellence ? Cet ami par excellence que nous avons à découvrir tout au long de notre vie par la prière, par la vie sacramentelle, nous pouvons entretenir avec lui une relation mystérieuse et réelle qui nous transforme, qui nous fait peu à peu apprendre à aimer comme il aime. « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés », c’est le sommet de la révélation évangélique. Il s’agit pour chaque fidèle, vivant de l’Esprit qui l’habite, d’aimer comme Dieu aime. Impossible à l’homme, mais possible à tout croyant qui accepte justement dans la prière, jour après jour, de collaborer avec l’Esprit Saint.

Chers amis, vous ne croyez pas seulement qu’il est vivant, pour demander le baptême. Mais vous croyez que son enseignement, ce qu’il a dit, ce qu’il nous apprend dans l’Évangile, est la sagesse suprême. Il n’y a pas de sagesse supérieure à celle-là. Il nous dit qu’il est « la » vérité, il n’y a pas trente-six vérités, il n’y en a une. Cette vérité qui est la vérité de l’amour. Jésus nous révèle que Dieu est amour et que nous pouvons à sa suite aimer comme il aime, sans juger personne, en vivant dans la bienveillance à l’égard de tous, spécialement à l’égard de nos ennemis. Pure folie au plan humain ! Et pourtant, Jésus nous invite à suivre son exemple. Du haut de la croix il a dit : « Père, pardonne-leur ». Le pardon, c’est divin. L’exemple que les chrétiens peuvent donner en pardonnant, révèle le visage du Christ. Si vous demandez le baptême, c’est que véritablement vous voulez apprendre, jour après jour, toute votre vie, à connaître et aimer Jésus. Il y a un moyen très simple : lire l’Évangile. C’est possible à votre âge, quelques lignes chaque jour. Comme ils n’y arriveront pas, chers parents, je compte sur vous pour les aider à être fidèles.

À partir du baptême nous portons le nom sublime de « christi fideles » : fidèle du Christ. Que faisons-nous ? Sommes-nous de véritables fidèles du Christ ? Permettez-moi d’admirer cette assemblée magnifique d’aujourd’hui, une cathédrale pleine ! Je n’ose pas demander au curé s’il en va ainsi tous les dimanches ? Ce serait pourtant si normal. Que faisons-nous de nos vœux, de nos engagements baptismaux, frères et sœurs ? Chers amis qui demandez le baptême, cela signifie que dimanche prochain vous serez là, et de dimanche en dimanche, pour célébrer, dans la joie, la résurrection du Seigneur, sans cela ce que nous faisons aujourd’hui n’a pas de sens. Il faut que nous soyons « sérieux », on ne peut pas se moquer de Dieu. Que vaut un engagement qui n’est pas tenu ? Évidemment, c’est difficile, et nous sommes dans un monde où, d’après un hebdomadaire lu récemment, il y avait en France dans la génération des seize à vingt-neuf ans, seulement 23% de ces jeunes qui se disent chrétiens ! Chers amis, vous qui êtes l’avenir de l’Église, cela ne sera pas toujours commode d’affirmer votre foi et pourtant je vous invite d’accepter d’être différents dans un monde qui ne connaît plus le Seigneur mais qui, bien souvent, aspire à le connaître. Comment nos contemporains pourront-ils connaître le Seigneur si nous sommes des chiens muets, si nous n’osons pas par notre vie d’abord, mais aussi par nos paroles, les éclairer, ceux qui sont dans la nuit. Pour nous, le Christ est véritablement la lumière dans les ténèbres que nous rencontrons si souvent dans nos propres existences. Apprenez jour après jour à connaître Jésus et à l’aimer ; car on ne parle bien que de ses amis, que de ceux que l’on connaît en vérité. Si vous faites ainsi, vous pourrez devenir ces disciples-missionnaires que le Pape François nous invite à être. Pour cela il nous invite sans cesse à la conversion. Le Pape dans un magnifique texte, « La joie de l’Évangile », parle des conversions pastorales… pastorales ?…, le pasteur, c’est l’évêque ! Et bien non ! Le Pape nous dit que tout baptisé par le baptême devient prêtre : il offre sa vie ; il devient roi : le roi est le serviteur de tous ; et il devient prophète : il parle au nom de Dieu. Il n’y a pas besoin nécessairement de Monsieur le curé pour parler de Jésus. Tout baptisé doit être capable, comme dit saint Paul, de rendre compte de sa foi.

Frères et sœurs, avec l’aide de l’Esprit Saint – par nos seules forces c’est impossible – avec l’aide de l’Esprit Saint qui vit en nous, si nous le prions, si nous entretenons une relation intime et forte avec l’Esprit Saint, il nous conduira au Christ. Nous découvrirons jour après jour davantage son visage et nous serons capables de le faire connaître pour le bonheur de nos proches, de nos contemporains, car nous croyons véritablement que Jésus est le Sauveur, sinon nous ne serions pas ici ce matin, il n’y a pas d’autre sauveur. Tant d’hommes et de femmes aujourd’hui ne le connaissent plus. À nous de le révéler par notre vie, par nos actes. Prions frères et sœurs au cours de cette célébration pour que ceux qui vont être baptisés et tous ceux qui les entourent soient véritablement des êtres nouveaux, renouvelés par la grâce baptismale, qu’ils sachent, que vous sachiez, chers enfants, avoir recours à tout ce que vous propose l’Église : les sacrements, et en particulier l’Eucharistie. Mais aussi tous les sacrements : savoir se reconnaître pécheur, après son baptême, malheureusement il arrive de pécher à nouveau, mais il est possible de recevoir à nouveau un baptême dans les larmes grâce au sacrement de la réconciliation et de la pénitence. Si la maladie nous atteint, le sacrement des malades peut être reçu. Ayez recours à ce que l’Église vous offre pour devenir des saints. C’est la vocation de tout baptisé. Prions pour ces jeunes qui vont être baptisés et demandons les uns pour les autres, pour toute l’Église, la grâce d’un renouveau missionnaire, d’un zèle missionnaire pour que la France retrouve le visage du Christ d’une manière plus prégnante, plus vraie, que tous nous nous convertissions, les plus jeunes comme les plus âgés, et prions tout spécialement pour les plus jeunes générations qui auront à faire connaître le Ressuscité demain !

Amen.

† Jean Legrez, o.p.
Archevêque d’Albi

 

En la cathédrale Sainte-Cécile, d’Albi – 1er avril 2018

1ère lecture : Ac 10, 34a.37-43
Psaume : 117, 1.2, 16-17, 22-23
2ème lecture : Col 3, 1-4
Évangile : Jn 20, 1-9