À la suite des deux synodes d’octobre 2014 et d’octobre 2015 sur la famille, eux-mêmes précédés de vastes consultations auprès des diocèses du monde entier, le pape François a rendu public le 8 avril 2016 l’exhortation apostolique post-synodale intitulée Amoris Laetitia, l’amour dans la famille.
En 2016, pour la fête de saint Joseph, chef de la Sainte Famille et patron de l’Église universelle, le Pape François a voulu offrir aux catholiques une exhortation apostolique à la suite des deux récents synodes sur la famille, intitulé d’un titre attrayant : « La joie de l’amour ».
Ce n’est pas seulement le titre qui devrait attirer l’attention des fidèles, mais le contenu de cette petite « somme » sur la famille. Le texte est long (255 pages), écrit dans un style très simple et abordable par le plus grand nombre. Les nombreux thèmes abordés au cours des synodes expliquent l’épaisseur du volume, mais le pape précise : « je ne recommande pas une lecture générale hâtive. Elle sera plus bénéfique, tant pour les familles que pour les agents de pastorale familiale, s’ils l’approfondissent avec patience, morceau par morceau, ou s’ils cherchent en elle ce dont ils peuvent avoir besoin dans chaque circonstance concrète » (n°7).
Constitué de neuf chapitres, ce document aborde tous les aspects de la vie conjugale éclairés par la Parole de Dieu et la Tradition de l’Église, c’est à- dire son enseignement depuis les origines jusqu’à l’apport considérable sur ce sujet du bienheureux Paul VI, de saint Jean-Paul II et de Benoît XVI. Le Pape François enracine sa synthèse sur la famille dans l’Écriture en commentant le psaume 128 et en reprenant de nombreux passages de l’Ancien Testament comme du Nouveau, qui dessinent le profil de la famille selon le dessein de Dieu avec ses bonheurs et ses crises, sachant que « nous contemplons la famille que la Parole de Dieu remet entre les mains de l’homme, de la femme et des enfants pour qu’ils forment une communion de personnes qui soit l’image de l’union entre le Père, le Fils et l’Esprit Saint » (n°29).
Avec réalisme le pape passe en revue les difficultés et les défis actuels que rencontrent les familles. Puis il rappelle la vocation de la famille selon l’Évangile et son développement au cours de la vie de l’Église : indissolubilité, sacramentalité, transmission de la vie et éducation des enfants. Un magnifique commentaire (chapitre IV) de l’hymne à la charité (1Co 13, 4-7), appliqué à la vie des époux et de tous les membres d’une famille, offre à chacun des moyens concrets de favoriser la croissance de l’amour au sein de la famille.
Puis le chapitre V est consacré à l’amour qui devient fécond en accueillant la vie nouvelle comme un don de Dieu, où le rôle de la mère comme celui du père sont précisés avec clarté pour la bonne et heureuse croissance des enfants. Des perspectives pastorales sont proposées autant pour la préparation du mariage que pour son accompagnement après la célébration du sacrement pendant les premières années de la vie de couple. Tous les couples devraient pouvoir être accompagnés, spécialement ceux qui connaissent des situations difficiles et complexes, y compris lors du deuil d’un être cher (chapitre VI).
Le pape estime que l’éducation des enfants doit être renforcée. En bon pédagogue, il souligne que les parents, avec patience, sont appelés « à promouvoir des libertés responsables » (chap. VII). La formation morale suppose d’éduquer la volonté pour « développer de bonnes habitudes et des tendances affectives au bien ». La fermeté et la correction sont nécessaires, autant que la stimulation et les encouragements dans tout processus éducatif équilibré dans le cadre de la famille, qui « est le premier endroit où on apprend à se situer face à l’autre », « le lieu de la première socialisation ». Est soulignée l’importance d’une éducation sexuelle qui aide les jeunes à se préparer à un véritable amour, de telle sorte que celui-ci puisse s’exprimer par un don total de soi et, après un engagement public, se réaliser dans le don réciproque des corps. Enfin, la transmission de la foi fait pleinement partie de l’éducation des enfants : « la famille doit continuer d’être le lieu où l’on enseigne à percevoir les raisons et la beauté de la foi, à prier et à servir le prochain » (n° 287).
Après avoir affirmé que toute rupture du lien matrimonial « va à l’encontre de la volonté de Dieu, l’Église est également consciente de la fragilité de nombreux de ses fils », le pape consacre le chapitre huitième à ceux et celles qui sont blessés, égarés, fragilisés. L’Église doit redonner à tous confiance et espérance en leur proposant un accompagnement, qui ne saurait exclure un discernement toujours respectueux des exigences de vérité et de charité de l’Évangile. Aux pasteurs est confiée la tâche délicate du discernement dans les situations irrégulières pour apporter à chacun l’aide la plus appropriée de l’Église. « Il s’agit d’intégrer tout le monde, on doit aider chacun à trouver sa propre manière de faire partie de la communauté ecclésiale, pour qu’il se sente objet d’une miséricorde imméritée, inconditionnelle et gratuite » (n° 297).
Enfin, le dernier chapitre est consacré à la spiritualité matrimoniale et familiale. La communion entre les époux et les membres d’une famille est habitée par l’amour divin. La prière en famille est alors un moyen privilégié de croissance dans la foi, ainsi que la participation à l’eucharistie dominicale. Inviter à contempler chaque proche avec les yeux de Dieu et reconnaître en lui le Christ favorise la délicatesse mutuelle, l’attention, la consolation, l’encouragement. Chaque famille en étant une réelle « église domestique »participe à la transformation du monde, évangélise, accueille…
Que la Vierge Marie nous aide « à prendre conscience du caractère sacré et inviolable de la famille, de sa beauté dans le projet de Dieu ! Que la Mère de Dieu nous obtienne la grâce d’accueillir ce bel enseignement et, avec l’aide de l’Esprit Saint, d’en vivre et de le faire connaître ! »
† Jean Legrez, o.p.
Archevêque d’Albi